jeudi 14 mai 2020

Commémoration de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Deuxième partie.

Commémoration confinée du 8 mai 2020

Fête de la Libération 1945

Cette année, nous devions commémorer les 75 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Malheureusement, face à la pandémie du coronavirus, les manifestations envisagées n’ont pas eu lieu.

Sur recommandation gouvernementale, les rassemblements face aux lieux de mémoire et du souvenir ont été limités.

 

Ainsi, à Paris, sous l’Arc de Triomphe, se sont retrouvés le Président de la République, le 1er Ministre, les ministres en rapport avec l’armée et les anciens combattants, le Président du Sénat, le président de l’Assemblée Nationale, deux anciens présidents de la République, les chefs des armées et le Maire de Paris.

 

Cérémonie confinée à Paris pour le 8 mai 2020.

 

La cérémonie fut très courte et l’image du chef de l’état se lavant les mains, après la signature du livre d’or du ravivage de la flamme,  restera sans aucun doute dans les mémoires.

 

Cérémonie sous l’Arc de Triomphe le 8 mai 2020.

Le Président de la République se désinfecte les mains avec un gel.

 

Cérémonie du 8 mai 2020 sous l’Arc de Triomphe. Les invités.

 

Avant la cérémonie, une gerbe fut déposée devant la statue du Général de Gaulle en présence de son petit-fils.

 

Cérémonie confinée du 8 mai 2020 devant la statue du Général de Gaulle à Paris.


A Lille, la cérémonie fut aussi courte en présence du Maire de la ville, d’un sénateur et d’un député.

  

Cérémonie confinée du 8 mai 2020 à Lille.

 

A Pérenchies, Madame le Maire, Danièle Lekien, déposa une gerbe au Monument aux Morts de la Grand’Place en présence du Président de l’UNC, section locale, Jean-Pierre Brame, qui portait le drapeau tricolore.

La même cérémonie se déroula au monument de la Déportation, rue des Résistants.

Les images du premier dépôt de gerbe ont été diffusées par la suite sur la page Facebook de la ville.

Cette année, le message officiel était signé par Emmanuel Macron. Il fut diffusé sur le site de la ville.

 

Message d’Emmanuel MACRON, Président de la République, à l’occasion du 8 mai 2020.

 

« Ce 8 mai ne ressemble pas à un 8 mai. Il n’a pas le goût d’un jour de fête. Aujourd’hui, nous ne pouvons pas nous rassembler en nombre devant les monuments de nos villes, sur les places de nos villages, pour nous souvenir ensemble de notre histoire. 
Malgré tout, la Nation se retrouve par la pensée et les mille liens que notre mémoire commune tisse entre chacun de nous, cette étoffe des peuples, que nous agitons en ce jour dans un hommage silencieux. C’est dans l’intimité de nos foyers, en pavoisant nos balcons et nos fenêtres, que nous convoquons cette année le souvenir glorieux de ceux qui ont risqué leur vie pour vaincre le fléau du nazisme et reconquérir notre liberté.  
C’était il y a 75 ans. 
Notre continent refermait grâce à eux le chapitre le plus sombre de son histoire : cinq années d’horreur, de douleur, de terreur. Pour notre pays, ce combat avait commencé dès septembre 1939.
Au printemps 1940, il y a 80 ans, la vague ennemie avait déferlé sur les frontières du Nord-Est et la digue de notre armée n’avait pas tenue. 
Nos soldats pourtant s’étaient illustrés à de nombreuses reprises. Ceux de Montcornet, d’Abbeville, de Gembloux ou de Stone, les hommes de Narvik, les cadets de Saumur, l’armée des Alpes avaient défendu avec vigueur notre territoire et les couleurs de notre pays. 
Ils sont « ceux de 40 ». Leur courage ne doit pas être oublié. 
Dans le crépuscule de cette « étrange défaite », ils allumèrent des flambeaux. Leur éclat était un acte de foi et, au cœur de l’effondrement, il laissait poindre la promesse du 8 mai 1945. Cette aube nouvelle fut ensuite conquise de haute lutte par le combat des armées françaises et des armées alliées, par les Français Libres qui jamais ne renoncèrent à se battre, par le dévouement et le sacrifice des Résistants de l’Intérieur, par chaque Française, chaque Français qui refusa l’abaissement de notre nation et le dévoiement de nos idéaux. 
La grande alliance de ces courages permit au Général DE GAULLE d’asseoir la France à la table des vainqueurs. La dignité maintenue, l’adversité surmontée, la liberté reconquise, le bonheur retrouvé : nous les devons à tous ces combattants, à tous ces Résistants. 
A ces héros, la Nation exprime son indéfectible gratitude et sa reconnaissance éternelle. Le 8 mai 1945, c’est une joie bouleversée qui s’empara des peuples. Les drapeaux ornaient les fenêtres mais tant d’hommes étaient morts, tant de vies étaient brisées, tant de villes étaient ruinées. A la liesse succéda la tristesse et la désolation. Avec le retour des Déportés,les peuples découvrirent bientôt la barbarie nazie dans toute son horreur…                                                                                                                                                              

Rien, plus jamais, ne fut comme avant. La fragilité révélée de nos vies et de nos civilisations nous les rendit plus précieuses encore. Au bout de cette longue nuit qu’avait traversée le monde, il fallait que l’humanité relevât la tête. Elle venait de découvrir horrifiée qu’elle pouvait s’anéantir elle-même et il lui fallait désormais refaire le monde, de fond en comble, ou à tout le moins « empêcher que le monde ne se défasse », selon le mot de Camus. 
Ce fut l’heure, en France, de l’union nationale pour fonder « les beaux jours » annoncés par le Conseil National de la Résistance et bientôt retrouvés. 
L’heure, en Europe, de l’effort commun pour bâtir un continent pacifié et fraternel. 
L’heure, dans le monde, de construire les Nations unies et le multilatéralisme.                                                       Aujourd’hui, nous commémorons la Victoire de ce 8 mai 1945, bien sûr, mais aussi, mais surtout, la paix qui l’a suivie. 
C’est elle, la plus grande Victoire du 8 mai. Notre plus beau triomphe. Notre combat à tous, 75 ans plus tard.

Vive la République ! Vive la France ! »

Emmanuel Macron

 

 

 





















Un message envoyé par M. Herman Küsgen, président allemand du Comité de Jumelage d’Overath a été reçu par notre ville. En effet, nos amis d’outre-Rhin auraient dû être présents pour ce 75ème anniversaire.

 

Logo d’amitié franco-allemande

 

„Gedenken am 08. Mai / Commémorations du 08 Mai

Am 08. Mai jährt sich das Ende des schrecklichen zweiten Weltkrieges zum 75. Mal. Auch dieser Krieg hat unsägliches Leid über die Völker Europas und der ganzen Welt gebracht. Millionen Menschen haben ihr Leben verloren, aber nicht nur durch Kriegshandlungen, sondern viele auch, weil sie Opfer rassistischer, politischer oder weltanschaulicher Verfolgung wurden. Viele verloren ihre Gesundheit oder Ihre Heimat. Das deutsche Volk hat in den Jahren der Nazidiktatur und dieses Krieges große Schuld auf sich geladen, mit der es umgehen muss.

Le 8 mai, il y a 75 ans, la terrible deuxième guerre mondiale se terminait. Cette guerre aussi a entraîné des indicibles misères aux peuples de l’Europe et du monde entier. Des millions de personnes ont perdu leurs vies, pas seulement dans des batailles. Beaucoup d’entre elles sont devenues victimes de persécution à cause de leurs races, leurs convictions politiques ou idéologiques. Beaucoup d’hommes ont perdu la santé ou le pays. Le peuple allemand s’est rendu coupable des années de la dictature des Nazis et de cette guerre et doit s’en arranger.

Heute glauben wir sagen zu können, dass wir Deutschen aus den Fehlern der Vergangenheit gelernt haben. Wir sind wieder ein anerkanntes und angesehenes Mitglied der Völkergemeinschaft insgesamt und der Europäischen Gemeinschaft insbesondere. Ein tragendes Element dieser Entwicklung ist die Überwindung der Mär von der Erbfeindschaft mit unserem Nachbarn Frankreich, hin zu einer vertrauensvollen Zusammenarbeit.

Aujourd’hui, nous croyons pouvoir dire que nous, les Allemands, avons appris nos leçons du passé. Nous sommes un membre reconnu et estimé de la communauté des peuples et de la Communauté Européenne en particulier. Surmonter la nouvelle d’une hostilité héréditaire contre nos voisin, les Français, c’est un pilier central de cette évolution jusqu’à une coopération plein de confiance.

Damit dies so bleibt und wir unserer geschichtlichen Verantwortung auch weiterhin gerecht werden können, ist es notwendig, sich immer wieder zu erinnern und vor allen Dingen, immer wieder aufkommende Gefahren für Frieden, Freiheit und Demokratie rechtzeitig zu erkennen und Ihnen entschlossen entgegenzutreten.

Afin qu’il reste comme ça et que nous continuons de tenir compte de notre responsabilité,  il est nécessaire de se souvenir de nouveau et toujours reconnaître et combattre les dangers pour la paix, la liberté et la démocratie qui se montrent toujours.

Der 08. Mai ist ein solcher Anlass zum Erinnern, zur Schärfung des Bewusstseins. Es hätte auch ein Tag der Begegnung werden sollen. Unsere Freunde aus unserer französischen Partnerstadt Pérenchies hatten uns die Ehre und die Freude bereitet, uns zu den dort geplanten Gedenkveranstaltungen einzuladen. Aufgrund der Corona-Pandemie sind leider alle Veranstaltungen abgesagt und ein Besuch in unserer Partnerstadt ist nicht möglich.

Le 8 mai est une telle occasion de se souvenir et de se rendre compte. Et il aurait été un jour de rencontre. Nos amis de Pérenchies, la ville française jumelée avec nous, nous avaient fait l’honneur et la joie de nous inviter aux festivités de commémoration qui étaient projetées. A cause de la crise du Corona, toutes les cérémonies sont annulées et une visite en notre ville jumelée n’est pas possible.

Deshalb senden wir auf diesem Wege ein Zeichen der Freundschaft und der Verbundenheit. Wir hoffen und freuen uns auf ein baldiges Wiedersehen und sind uns sicher, dass unsere Partnerschaft nicht nur diese Corona-Krise überstehen wird!

C’est pourquoi nous envoyons un signe d’amitié et de solidarité. Nous espérons et nous nous réjouissons de pouvoir vous revoir bientôt. Nous sommes certains que notre jumelage va surmonter la crise du corona !

In Freundschaft / Amitié`

Partnerschaftskomitee / Comité de jumelage

Hermann Küsgen“

 

Les cérémonies supprimées seront peut-être reportées en septembre prochain à l’occasion de la Fête de la Libération de Pérenchies du 6 septembre 1944 si les conditions sanitaires le permettent et les rassemblements autorisés.

Quelques membres de notre association nous ont fait parvenir quelques photographies sur ce 8 mai 2020 confiné.   

 

Thérèse-Marie et Jean-Pierre

 

Francette


 

Geneviève

 

Roselyne et Daniel

 

Alain

 

Patricia

 

Monique
 


Vincent

 

Philippe

 D’autres Pérenchinois ont répondu à notre appel. Ainsi ce nouvel habitant de notre commune, amateur de véhicules militaires anciens, qui a stationné son véhicule de collection devant le monument de la place du Général de Gaulle ce 8 mai 2020.

 

Véhicule militaire de collection devant le monument de la Grand’Place,

 ce jeudi 8 mai 2020

 

Philippe JOURDAN

11 mai 2020

 Correction et édition : Jean-Pierre COMPERE, administrateur du Blog







Affiche 8 mai 1945. Document 2 internet.

Cette année, le vendredi 8 mai 2020, nous devions commémorer le 75ème anniversaire de l’Armistice de 1945.
Mais, en cette période de confinement, le gouvernement a interdit toutes les cérémonies patriotiques et les rassemblements.
Le Devoir de mémoire s’est exercé par un pavoisement (installation du drapeau tricolore) sur l’hôtel de ville et un dépôt d’une gerbe de fleurs au Monument aux Morts de la Place du Général de Gaulle par Mme le Maire accompagnée d’un porte-drapeau de l’UNC, section locale.



Le monument aux morts de la Place du Général de Gaulle à Pérenchies.
Document internet seconde vue.
Ce 8 mai 2020, nous avons publié un premier document sur la guerre 1939/1945. En voici la seconde partie avec toujours des photographies et des textes réalisés par des habitants de notre ville qui ont voulu nous laisser leurs témoignages. 
Ainsi s’exercera ce Devoir de Mémoire essentiel pour notre société.

Les Anglais à Pérenchies.
Madame LEVEQUE (mai 1994).
« La commune réalisait une fois par mois avec le docteur Nuyts et Monsieur Lebleu des colis pour les prisonniers à la salle Jeanne d’Arc. Le bruit courait que mon mari était décédé. Je suis restée 9 mois sans nouvelles. A Pérenchies, c’était assez dur. Je ne sortais pas car j’avais peur. Un jour, en faisant la queue chez le boulanger, un obus est tombé. Je me suis sauvée. On travaillait mais la nourriture était limitée. Je crois que l’on avait 150g de pain par jour.
Au début de la guerre, des Anglais ont séjourné avec un groupe de musiciens du 97ème Royal-Artillerie. Comme ils sont partis précipitamment, ils ont abandonné les instruments et la mairie les a cachés. Après la guerre, ils sont venus les rechercher en remerciant notre ville. Je me souviens aussi d’un aviateur anglais qui est resté caché chez Madame Carpentier dans une fosse à eau de pluie qui avait été vidée ».


Des Britanniques à Pérenchies en 1940 avec Mme LEVEQUE et sa fille.
Document SPMC numéro 3 834
Anglais qui a logé chez Mme Westeel rue des cousins en 1940
Document SPMC numéro 3 362


Des Anglais ont séjourné à Pérenchies en 1940.
Parmi eux, Mac et Charly.
Document SPMC numéro 3 830

Des Anglais ont séjourné à Pérenchies en 1940.
Document SPMC numéro 3 831
Ma vie à Pérenchies pendant la guerre 39/45
Madame MARSELOO
« Pendant la guerre, mon mari était prisonnier et je tenais le Café de la Place aidée de mes parents. Au début du conflit, des soldats français venaient déjeuner à la maison. Ensuite, on a vu arriver des Anglais qui logeaient à la salle des fêtes, à la salle paroissiale ou à la brasserie. Ils sont partis quand les Allemands sont arrivés, en 1940. Ils logeaient chez les gens qui avaient un lit de disponible. Je n’ai eu aucun problème avec celui qui logeait au café. C’était un protestant qui avait trois enfants. Dans la chambre qu’il occupait, il y avait un crucifix. Plusieurs fois, il l’a enlevé. Chaque fois, je l’ai remis et, à la fin, il l’a laissé.
Comme j’avais un café à tenir, je n’avais pas le temps d’aller dans les fermes. Je n’avais donc que les tickets de rationnement pour vivre. Pour moi et ma fille, ce ne fut pas toujours facile. Ces tickets étaient distribués tous les mois à la mairie. Une fois, j’en ai acheté en plus au marché noir mais comme la mairie avait été cambriolée, tous les tickets ont été annulés. !
Une fois, un bombardement a eu lieu près du football et deux enfants ont été tués. Ils avaient 11 mois et 6 ans. Une autre fois, une maison a été détruite rue de la gare.
J’avais connu la guerre de 1914 à Armentières mais comme on était avec les Anglais on n’avait jamais eu faim. Ce ne fut pas le cas ici ! Toutes les boucheries de la commune s’étaient rassemblées en une seule. Une fois, nous avons reçu de la viande avariée. Beaucoup de personnes ont été malades. Un jour, les Allemands ont démonté le zinc de mon comptoir pour la réquisition des métaux. Ils venaient parfois boire dans le café et jouer aux fléchettes.
Les derniers jours, on n’a pas ouvert le café. On avait peur des représailles. On avait mis des planches sur les fenêtres. On avait aussi hébergé pendant plusieurs mois un couple de rescapés du bombardement de Lille Délivrance. Cette nuit-là, on s’est tous réveillé et on s’est caché dans une petite pièce dans le noir jusqu’au matin. Une bombe est tombée au Grand But et d’autres vers Verlinghem. On a eu très peur. Il y avait souvent des alertes mais jamais si près ».


Mme Marseloo et sa fille et le café de la Place
Document SPMC numéro 252


Des prisonniers de guerre en Allemagne en 1942.
Document SPMC numéro 499
Nous avons évacué avec une voiture tirée par un cheval.
Anne-Marie JOURDAN-CAZIER
« Je suis née en 1931 dans une maison de la rue de la Prévôté dans les bas. Mes parents étaient exploitants agricoles. Nous avions un cheval qui s’appelait Fanny. En 1940, on a évacué car les Allemands étaient là avec des canons dans la cour. Nous avons fui vers Laventie en mettant un matelas sur une voiture tirée par un cheval. On a emmené les animaux et quelques biens. Nous avons mis les poules dans des casiers. Sur la route, nous entendions les vaches crier car la traite ne se faisait pas. Certaines fermes étaient abandonnées. On y entrait parfois pour essayer de trouver de la nourriture. Plusieurs fois, nous avons été mitraillés par des avions. On se cachait alors dans les fossés. Parfois, on restait au fond du véhicule, tout tremblants. On est rentré quelques semaines plus tard car cela semblait s’être calmé. Toute notre maison avait été visitée et détériorée. Nos cahiers d’école étaient déchirés et souillés. Tous les meubles étaient ouverts et souvent vides.
Mes parents ont ainsi continué l’exploitation agricole durant toute la guerre ».


Le quartier des bas de Pérenchies. Cultures maraichères. Terrains de Paul-André CAZIER.
Photographie non datée.
Document SPMC numéro 1 973.

Les salades de la peur.
Thérèse DEWULF-AHACHE
« Pour éviter les bombes qui pourraient tomber sur notre maison, papa avec l’aide des voisins, avait décidé de faire un abri dans le fond du jardin, rue Gambetta.
Il a fallu creuser plusieurs mètres de profondeur. Quand il est arrivé à l’argile, c’était de plus en plus difficile. La terre était transportée par les enfants qui l’étalaient un peu plus loin. 10 personnes pouvaient y loger. Papa avait aussi installé des bancs.
Pour agrémenter l’abri et surtout pour ne pas perdre une parcelle de terrain, papa avait repiqué sur le dessus des salades. De cette façon, on ne remarquait pas non plus l’abri.
Quand la guerre fut terminée, il nous a assuré que jamais il n’avait eu de si belles salades ! »


La rue Gambetta. Entre les deux guerres.
Document SPMC numéro 1 177

Récit d’une évacuation en 1940
Marcel DEVOS Fils (février 2002)
« En mai 1940, les Allemands envahissent la Belgique.
De peur de se retrouver devant ces troupes, beaucoup de Pérenchinois ont évacué.
Les Ets Agache ont conseillé à mon père de partir vers Condé-sur-Noireau dans le Calvados car là se trouvait, soit disant, une usine textile pouvant nous accueillir.
Un matin, avec un groupe de 18 personnes, nous sommes partis.
Toutes nos affaires ont été mises dans une malle et nous avons pris le train en direction de Dunkerque.
Il s’arrête un peu avant car la ville a été bombardée et il prend la direction de Calais où on est hébergé pour la nuit dans une salle de billard d’un café appartenant au frère de Florent Bailleul.
La nuit ne fut pas de tout repos car il y eut des bombardements et elle se termina dans les abris.
Nous gagnons Boulogne où la nuit se passe dans les abris d’une place.
En sortant, la place et l’église n’étaient plus que des ruines.
Nous l’avons échappé belle !
On nous dit qu’à la radio, il avait été demandé aux hommes valides de partir et d’essayer de se mettre au service de la France. Nous nous sommes donc séparés. Les femmes sont restées ensemble tandis que les hommes, Monsieur DESEAUX, mon père, mon frère, Alexandre CARETTE et moi-même sommes partis à l’aventure car nous ne savions pas où aller.
Nous avons été mitraillés dans la forêt d’Hardelot par des avions allemands. Nous avons eu très peur !
Comme nous n’avions plus rien à manger, nous sommes rentrés dans un petit village de pêcheurs de crevettes, Equihen. A l’entrée, une vieille dame nous demande ce que nous cherchons. Nous lui racontons notre odyssée et, émue, elle nous propose une petite maison libre qu’elle louait lors de la saison des vacances.
Vous pensez notre joie !
Nous y sommes restés 8 jours face à la mer sur une hauteur.
Mon père et M. Deseaux partent vers Boulogne pour aller chercher du ravitaillement. Ils sont alors réquisitionnés par des Allemands qui les font travailler toute la journée au port. Le soir, ils les laissent repartir.
Sur le chemin, ils découvrent dans les fossés des cadavres des réfugiés mitraillés dans la journée.

Un matin, on entend des bombes vers la nuit sans savoir ce qui se passait mais le lendemain, nous avons trouvé une sorte de malle sur la plage avec des conserves à l’intérieur et un carnet de bord anglais qu’on a remis à la mairie.
Un jour, nous avons la surprise de voir arriver dans le village les femmes de notre groupe. Ce furent des embrassades après ces 8 jours de séparation.
Le lendemain, nous racontons nos retrouvailles à la dame qui nous prêtait sa maison. Elle nous en propose alors une plus grande au Portel où nous sommes restés 3 semaines. Pour les plus jeunes, ce furent de belles vacances!
Les Allemands occupant toute la région, il n’y eut plus de bombardements et on prit la décision de rentrer à Pérenchies.
Le voisins Joseph POLET et son épouse et Angèle DESCASTEKERE s’étaient occupés de notre maison qui n’avait pas été dévastée.
Malheureusement, on avait perdu la malle avec tous les souvenirs de la famille.
(Noms des personnes qui ont participé à cette aventure : M. et Mme DESEAUX et leurs enfants Raymonde, Lucienne et Gérard, Mme Carette, sa mère et son fils Alexandre, Mme Marie Saingier et son fils, Mme Germaine WAGNON  et ses nièces Renée et Yolande DUPRE, Mon père, Marcel DEVOS et ma mère et leurs trois enfants : Jérôme, Jeanne et moi-même Marcel) ».


Marcel DEVOS, sa mère, sa sœur Jeanne et son père Marcel
Document SPMC
A la filature
Geneviève MONSAURET-PAUWELS (juillet 1998)
« En 1940, après l’exode de l’évacuation, les Allemands étant installés en France, le travail à l’usine a repris progressivement. Ayant eu 14 ans le 26 septembre 1940, le 3 décembre, je rentrais à l’usine Agache pour travailler à la petite filature. Je suis passée par le bureau de M. Maurice POLLET pour remplir mon livret. Puis, c’est Raymond PICHON qui m’a emmenée sur le lieu de mon travail. Les contremaîtres étaient Jules et Henri DUMONT, deux frères déjà assez âgés mais qui avaient repris du travail du fait que les hommes les plus jeunes étaient prisonniers en Allemagne. Mon père n’étant pas parti à la guerre, nous avions donc deux salaires qui entraient à la maison. Puis des garçons partirent dans les Ardennes travailler dans les forêts avec M. Tardif pour échapper au STO ».


Les Ets Agache entre les deux guerres.
Carte postale SPMC numéro 1 190
Prisonnier de guerre
Alphonse LEVEQUE (mai 1994).
« J’ai été mobilisé en 1938 à l’âge de 37 ans.
En août 1939, j’ai été affecté au 166ème régiment d’infanterie. On a construit des blockhaus qui sont restés inachevés.
En juin 1940, je me suis retrouvé dans les Vosges. Prisonnier, j’ai été emmené près de Strasbourg puis en Allemagne. On était parfois accueilli à coups de pierres par certains habitants.  Les prisonniers étaient emmenés pour travailler dans des fermes ou des entreprises.
Je suis resté prisonniers plus de 5 ans. On recevait peu de courrier et parfois un colis nous arrivait.
On ne pouvait pas s’échapper. Certains ont essayé mais se sont retrouvés dans des camps disciplinaires.
Des prisonniers russes ont été abattus froidement car ils avaient ramassé des pommes de terre dans les champs pour se nourrir.



M. LEVEQUE, prisonnier de guerre en Russie.
Document SPMC numéro 4 173

J’ai été libéré en janvier mais je ne suis rentré à Pérenchies que le 12 septembre 1945. On devait attendre dans des casernes. Ma femme me croyait mort.
Un jour, nous avons embarqué sur un navire norvégien pour Dieppe. Le port était saccagé et ce ne fut pas facile pour y entrer. Quelle émotion en y entendant la « Marseillaise ».
J’ai rejoint Paris et enfin Pérenchies et j’ai repris mon travail à la fabrique chez Agache.
Je me suis fait inscrire à la section des prisonniers de guerre. Par la suite, j’en suis devenu le président ».
Retour des prisonniers de guerre. Vers 1945.
Camille DECAESTECKER, Axil LOUVET et Lucien LAVERNE
Document SPMC numéro 3 439

Réquisitionné pour le S. T. O.
Jérôme DEVOS.
« J’ai été réquisitionné pour le Service du travail Obligatoire et je suis parti par le train à Lille le 11 mars 1943.
Je me suis retrouvé près de Leipzig en Allemagne où j’ai vécu jusqu’au 19 avril 1945. Tous les jours, j’allais travailler dans une usine de fabrication de poudre, située en pleine forêt. Pour y aller, je devais prendre le train.
Un jour, on apprit que les Américains étaient aux portes de la ville et, le soir, le chef du camp nous dit qu’il fallait tous partir. Des policiers avec des fusils nous encadrent et nous arrivons dans une immense caserne rejoints très vite par des prisonniers russes, des hommes et des femmes.
Le lendemain matin, nous découvrons que nos gardes ont mis les bouts. Nous sommes libres, mais abandonnés seuls derrière l’Elbe, 300 Français et 1 300 Russes. Sur la route, les gens remplissent nos gourdes d’eau. La colonne s’étire sur 10 km sur une route appelée la route Napoléon !
Des civils nous hébergent parfois. Malheureusement, des soldats russes se livrent au pillage, au viol, aux représailles…
Sur une charrette, nous entassons nos effets et des pommes de terre. Nous retrouvons alors les troupes américaines. La radio nous donne des nouvelles de France.
Pour regagner notre pays, on s’entasse dans des wagons à bestiaux et traversons la Hollande avant d’atteindre Charleville-Mézières. J’arrive, en train, à Pérenchies le 25 mai 1945 ».   


Photo de la famille de Marcel DEVOS Père durant la guerre 1939/1945.
Cette photo a été envoyée en Allemagne à Jérôme, alors en STO.
Document SPMC numéro 3 359


Conseil municipal des années 70. Le Maire est Roger DUTRIEZ.
Jérôme DEVOS se trouve derrière, entre les deux portes.
Document SPMC numéro 5 986

Mon père s’appelait Emile POLET… 
Paulette VANDENBILCKE POLET
« Mon père, Emile POLET, faisait de la résistance durant la guerre dans le réseau VOIX DU NORD avec Maurice VANHONACKER. Il a été arrêté le 13 mai 1943 sur dénonciation.
Ce jour-là, à six heures du matin, la gestapo et les soldats nazis tenant des chiens ont frappé sur les volets de notre maison de Pérenchies. Toute la maison était encerclée. Mon père s’est habillé et il a été emmené en autobus. Il a été interrogé. Il a été battu.
Le 30 mai, je faisais ma communion. Nous sommes allés à Lille. On a eu 5 minutes pour le voir. Il est ensuite resté plusieurs mois à Loos. Un fois par mois, on pouvait porter un colis qui était fouillé mais on ne pouvait pas le voir. On y allait à pied. Ensuite, il a été transféré à Bruxelles puis en Allemagne.
De cette triste époque, il me reste 6 lettres. Il n’y disait pas grand-chose car le courrier était lu avant.
Un jour, il a été condamné à mort et il fut mis dans la cellule des condamnés. Celle-ci restait éclairée en permanence. Puis. Plus rien ! On a été des mois sans nouvelle.
A la libération, lors de l’arrivée des Anglais, on a eu des bonbons. C’était la joie pour beaucoup. Pour nous, c’était l’espoir d’un retour possible ou l’annonce d’une dramatique nouvelle. On passait des jours entiers à Lille à regarder les trains des rapatriés en espérant.
C’était épouvantable tous ces gens qui sortaient des trains avec la tenue des prisonniers.
Un soir, en 1945, très tard, il est rentré. Il était méconnaissable. Il avait perdu 50kg. Il ne voulait pas trop raconter ce qui lui était arrivé. On apprit tout de même qu’il avait été libéré par des Américains.
Il disait avoir eu honte, un jour, en allant dans une poubelle chercher une pomme pourrie car il avait faim !
Il est mort en 1952 de problèmes de santé causés par la déportation…. »



La communion de Paulette POLET en mai 1943 à Pérenchies.
Document SPMC numéro 3 870


Emile POLET (1893-1952) à son retour de déportation.
Document SPMC numéro 3 259


Un résistant bien oublié…
Francis Delforce (1999).
« Mon père Jules DELFORCE est né en 1913 à Pérenchies d’un soldat belge décédé en 1918 lors de la première guerre mondiale.
Son engagement dans la résistance n’est que le prolongement de ses idées.
En 1934, il effectue son service militaire au 8ème R.A.D de Nancy jusqu’en 1935.
Dès 1939, il est mobilisé et rejoint son régiment à Nancy sous le grade de sergent et participera aux batailles de Rouling, Grossterdorff, Ippling, des rives de l’Aisne aux rives de la Creuse.
Il est blessé à plusieurs reprises et décoré de la croix de guerre avec barrette France. Il est démobilisé le 16 juillet 1940 à Limoges-ouest.
A partir de 1940, il entre dans la résistance comme l’attestent Messieurs Raymond Beaussart,  Oscar Leroy et Marcel Fertein. Il sera recherché par la gestapo car il aidait à l’évasion et au ravitaillement de soldats alliés et récupérait de nombreuses armes pour armer la résistance.
A partir du 1er mars 1941, il fuit le Nord et se dirige vers Toulon (Var) afin de rejoindre l’armée du Général de Gaulle.
Il est arrêté en mer par la police maritime française et condamné le 22 août 1941 à dix mois de prison.
Revenu dans le nord, il est arrêté de nouveau et emprisonné à Loos du 2 janvier au 1er avril 1942. Une nouvelle fois, il doit fuir la région le 13 mai 1943 car on le recherche
Le 21, il passe en Suisse mais il sera interné au camp de Buren jusqu’au 7 août 1944.
Le 15 septembre 1944, il entre au deuxième bataillon de chasseurs alpins des Glières jusqu’au 25 décembre 1944. Dès janvier 1945, il revient dans le Nord.
Ses titres dans la Résistance sont très nets et son appartenance au mouvement Voix du Nord confirmée par une attestation en date du 3 mars 1946 (Parrains : Messieurs G. van Kemmel et E. Pollet, activité militaire et Journal). Un article du 27 mai 1966 de la Voix du Nord lui rend hommage par ce titre : « Hommage à Monsieur Delforce, médaillé des chemins de fer, membre fondateur du réseau «Voix du Nord» et résistant du maquis des Glières… »
En date du 21 juillet 1997, il est reconnu au titre d’interné résistant.
Les 24 et 25 septembre 1994, lors de la publication d’une plaquette sur le 50ème anniversaire de la libération de Pérenchies, mon père n’a pas été cité pour toutes ses activités dans la Résistance. En cette année 1999, je remercie l’association « Si Pérenchies m’était contée… » de réparer cet oubli.
Pour toutes ces actions, l’inscription de son nom sur le monument aux morts de Pérenchies serait justifiée…
Mon père est décédé le 22 mai 1966, à Faches-Thumesnil, des coups et blessures qu’il a reçus pendant la guerre ».


Photographie de Jules DELFORCE
Document SPMC numéro 2 258


Souvenirs de la Résistance
Roger MALLET
Extraits du livre « Les oubliés de la Résistance » de Madame LHEUREUX
« Pendant l’Occupation, de nombreux sabotages ont été effectués dans la région par la Résistance aidée de Pérenchinois en particulier lors de l’arrêt des trains en gare.
De 1943 à la Libération, plus de 1 000 étoiles de fer (clous en forme d’étoiles) seront semées sur les grandes artères de Lille et ses environs provoquant de nombreuses crevaisons.
En 1944, elles seront fabriquées chez Vrolant à Pérenchies.
Cette action a considérablement retardé la fuite des Allemands.
En mars 1943, des wagons d’alimentation sont incendiés et le 7 mai, 7 citernes d’essence sont détruites.
Le 22 décembre 1943 à 22h30, 17 wagons sont détruits. L’action est menée par un Pérenchinois, Fernand Sapin, qui hébergera par la suite un aviateur américain ; action qui causera l’incarcération de Madame Sapin à Loos.
Le 28 février 1944, la voie ferrée entre le Pont Ballot et celui de la Petite Belgique est sabotée par le groupe de Roger Lecerf.
Le 25 août, les voies ferrées sont détruites par plus de 200 résistants pour isoler Lille.
Début septembre 1944 ont lieu les combats de la Libération avec la perte de deux Pérenchinois.
Le 4 septembre, Lille est libérée. Marcel Fertein envoie un détachement reprendre sa femme et son fils cachés rue de Lomme et aidés par le secrétaire de Mairie, Edouard Bigot.
(Marcel Fertein participa en 1942 à la création du réseau de résistance « Sylvestre Farmer » avec le capitaine Michel. Ce réseau a à son actif les sabotages les plus importants de la région).
Avec l’aide de Pérenchinois, il fait cerner le château de Villers et libérer le Fort d’Englos ».



Marcel FERTEIN.
Photographie fournie par M. Roger MALLET
Document SPMC numéro 3 802


Vendresse
Résumé rédigé par Philippe JOURDAN grâce aux documents fournis par Henri-Claude TARDIF, Roger MALLET et Alphonse DAVID ainsi que la plaquette « « la rafle du 20 septembre 1943 à Vendresse et Omicourt » » écrite en juin 2004 par Marie-France BARBE.
 « Entre 1940 et 1942, un million-six-cent-mille prisonniers de guerre se retrouvent en Allemagne dans des camps ou chez l’habitant afin d’y travailler.
Face aux pertes militaires importantes, cela ne suffit pas pour remplacer les soldats allemands partis.
L’Allemagne décide, en accord avec le gouvernement français, une politique de recrutement d’ouvriers basée sur le volontariat qui devient, très vite, forcé.
M. BARBIER et M. Claude SAINT-LEGER, administrateurs des Ets Agache de Pérenchies, décident alors de faire partir les ouvriers requis par le STO en les envoyant sur le chantier forestier de Vendresse qui avait été créé en 1942 par les Mines de Lens afin de produire du bois et aussi d’occuper les chômeurs du textile du Nord.
Ce chantier leur permet alors d’éviter le départ en Allemagne.

M. Barbier Directeur chez Agache.
La photographie est postérieure aux événements.
Document SPMC numéro 465


Image mortuaire de Claude Saint-Léger, port pour la France le 14 décembre 1944
Document SPMC numéro 735

Le 1er juillet 1942, 27 Pérenchinois, employés de l’usine, et tous volontaires, partent dans les Ardennes.
Dans les bois, ils seront ainsi plus de 300 de toute la France à abattre les arbres à la hache.
Plus de 2 000 hommes seront ainsi accueillis à Vendresse, Omicourt, Saint-Aignan, Maison Rouge, Signy-l’Abbaye, Châtel-Chéhéry, Signy ou encore à Château-Porcien.
Des activités de détente se déroulent afin de passer le temps libre (théâtre, orchestre de jazz, football et basket).
Des actions de résistance y sont aussi organisés pour certains avec l’aide d’Henri-Claude TARDIF qui prendra le nom de Capitaine Thomas.
Quelques sabotages ont lieu mais il ne faut pas trop attirer l’attention des Allemands vers le chantier forestier. Alors, on s’entraîne  pour participer, le moment venu, aux combats de la libération.
Sur dénonciation par deux Alsaciens, prétendument déserteurs de l’armée allemande et accueillis à Omicourt, la Gestapo investit Vendresse le 20 septembre 1943. Le Préfet des Ardennes prétendra que les autorités d’occupation avaient estimé que plusieurs jeunes étaient en situation irrégulière.
Néanmoins, les conséquences sont dramatiques ! 32 réfractaires sont embarqués par camions et dirigés sur Paris ou l’Allemagne. M. Tardif et 10 chefs de section sont arrêtés et soumis aux interrogations. Certains subiront la torture, seront fusillés ou déportés dans les camps ».


Des jeunes de Pérenchies dans les chantiers forestiers de Vendresse.
Maison Rouge. 1943
Document SPMC numéro 6 298


Des jeunes dont certains de Pérenchies dans les chantiers forestiers de Vendresse.
Maison Rouge. 30 mars 1942. Document SPMC numéro 4 864

On m’envoie à Vendresse pour y recueillir des informations.
Alphonse DAVID
« Le 13 mars 1943, je suis parti avec mon ami Lucien VILLERS qui travaillait comme moi dans l’usine Agache pour rejoindre les jeunes Pérenchinois qui étaient au chantier forestier de Vendresse dans les Ardennes, certains depuis sa création en juillet 1942.
Henri-Claude TARDIF en était le directeur. Il avait été embauché par Joseph BARBIER, directeur de l’usine Agache. Il s’occupait des jeunes de l’entreprise et habitait avenue du Kemmel.
J’y suis resté jusqu’en août 1943 en m’occupant du poste de vaguemestre avant de retourner à Pérenchies pour devenir peigneron.
Mais, en septembre, le directeur, Monsieur BARBIER, me fait appeler dans son bureau et me demande d’y retourner discrètement afin de prendre des nouvelles suite à des arrestations qui s’y seraient déroulées.
L’Abbé LEDEIN et mes parents m’incitent à refuser face au danger possible. Néanmoins, je décide de partir et je prends le train.
A Charleville, à la descente du train, un officier allemand me demande mes papiers. Ma carte d’identité porte en rouge la mention de « MINEUR ». Je lui explique que je rejoints mon chantier forestier pour y couper du bois pour les mines du Nord sans rien ajouter. Il me laisse partir. Sur un quai, je vois un wagon de voyageurs qui s’apprête à partir pour l’Allemagne. Il est surveillé par des soldats allemands. Des jeunes s’y trouvent que je reconnais pour leur avoir porté leur courrier à Vendresse. Ils me font des gestes discrets mais je décide de  quitter précipitamment la gare. 
Je prends un autobus qui roulait au charbon de bois. Celui-ci me descend dans un petit village avant Vendresse où vit un ancien Pérenchinois, Maurice PETILLON, en compagnie de sa femme. Ils m’apprennent que parmi les réfractaires arrêtés, il n’y avait pas de Pérenchinois. Rassuré, je pars à pied et arrive dans la soirée. La postière et sa mère sont très étonnées de me revoir. Elles me demandent de faire attention car des Allemands peuvent encore faire des contrôles. Je décide donc d’aller voir Mme Tardif qui occupait le poste d’institutrice. Elle était encore sous le choc de l’arrestation de son époux. Elle m’hébergea pour la nuit à condition de partir tôt le matin car elle croyait que les Allemands reviendraient l’interroger.
Grâce à ces informations, je pourrai rassurer les familles restées à Pérenchies tout en ayant une pensée pour les 11 jeunes du train et leur directeur transféré à la prison de Charleville ». 


Alphonse DAVID à Vendresse entre mars et août 1943.
Document SPMC numéro 3 800

Par la suite, M Roger MALLET se rendra plusieurs fois à Vendresse pour se souvenir.
Photographie non datée.
Document SPMC numéro 2 218

Retour à Vendresse en 2005
Philippe JOURDAN
« En 2005, quelques membres de l’association d’histoire locale « Si Pérenchies m’était contée… » sont partis à Vendresse dans les Ardennes sur les traces de notre histoire locale. Ils étaient accompagnés de deux témoins de l’époque : Roger MALLET et Alphonse DAVID.
Les autorités du village nous accueillirent et une cérémonie fut organisée devant le monument aux morts du petit village.
Puis, une visite fut organisée dans l’église, au château où logeaient une partie des jeunes du chantier forestier et au cimetière où la plaque du souvenir a été placardée à l’entrée. Ce fut une journée pleine d’émotion et de bonheur pour tous les participants émus et respectueux ». 


En 2005, M. Mallet à Vendresse. Photographie SPMC

En 2005,  le château à Vendresse. Photographie SPMC

Dans le village de Vendresse en 2005. Photographie SPMC


Cérémonie patriotique à Vendresse avec Alphonse DAVID et Roger MALLET en 2005
Photographie SPMC


Les membres de « Si Pérenchies m’était contée… » autour du monument aux morts de Vendresse, en 2005
Photographie SPMC


Dans les rues de Vendresse en 2005
Photographie SPMC


Roger MALLET et Alphonse DAVID devant la plaque du souvenir
placée sur le  devant du cimetière de Vendresse.
Document SPMC
La soupe et le rata
Marie-Jeanne SANSOVINI-MILLEVYLLE (Août 1998)
 « Pendant l’occupation, le comité  d’entreprise avait organisé, à la pouponnière de l’usine, une distribution de soupe. Tous les ouvriers, hommes, femmes et enfants, et les retraités avaient le droit deux fois par semaine à une louche de soupe. Les ouvriers, en allant à leur travail, déposaient les pots ou les brocs et ils pouvaient les reprendre à 12H. Pour les retraités, c’était à 11H30.
Tous les jours, toujours à la pouponnière, les jeunes pouvaient aller manger le rata, des pommes de terre avec soit des haricots, soit des carottes, soit des pois-cassés. Le lard provenait des cochons élevés dans un bâtiment derrière et nourris avec les déchets des légumes. A 16H, tous les jours, les jeunes avaient ¼ de baguette ».


Vers 1942, distribution de soupe aux Ets Agache.
Document SPMC numéro 744
Revue « La construction moderne ». La pouponnière Agache. 1927.
Document SPMC numéro 666


Le 10 avril 1944, le bombardement de Lille-Délivrance.
François BAILLET (juillet 2004)
« La nuit est printanière. A la recette des PTT à Pérenchies, tout le monde dort. Je suis réveillé par le ronronnement d’un moteur d‘avion. Ma chambre qui est au premier étage s’ouvre par deux fenêtres dont l’une donne rue de Lille et l’autre rue de la poste face au café tenu par Madame Denise SAPIN. Il n’y a ni volets ni persiennes mais seulement des doubles rideaux roses suffisamment épais pour ne pas laisser passer la lumière électrique filtrer à l’extérieur et installés par ma mère. L’avion s’est éloigné. Je n’entends plus le bruit du moteur.
Soudain, ma chambre est inondée d’une lueur rougeâtre et murs et plafond s’embrasent. Je me lève, soulève les double-rideaux. Dans le ciel, des fusées éclairantes. On voit comme en plein jour. On perçoit le bruit vrombissant d’une première vague de bombardiers. Je dégringole les escaliers qui conduisent à la cave.
Nous allons être bombardés, dit mon père. Cette cave, j’en avais une peur bleue. Elle avait été bien étayée certes, mais mon père avait décliné poliment l’offre de son voisin, le docteur Nuyts, de la faire communiquer avec la sienne prétextant qu’en sa qualité de gérant des fonds publics, percer le mur n’aurait pas été prudent. Pas d’échappatoire possible donc si la maison venait à s’effondrer. Enterrés vivants ! A cette seule idée, mon sang  se glace dans mes doigts, ma bouche, mes lèvres se dessèchent et, toujours ces vrombissements, ce sol qui tremble au fur et à mesure que les bombes, par chapelets entiers, la défoncent. Bref, pendant plus d’une heure, les escadrilles se succèdent, vague après vague. Que visent-elles ? Nous n’en savons rien.
Nous l’apprendrons au lever du jour : la gare de triage de Lille-Délivrance.
Les bombes atteignent Lomme d’abord, la campagne puis Pérenchies.
La dernière est tombée au pied d’un arbre situé à l’entrée du pré qui jouxte la propriété de Monsieur Louis Ducroquet, qui fait fonction de maire, 1 rue de Lomme.
L’arbre est déraciné. La clôture ornementale qui limitait le terrain est gravement endommagée ainsi que le garage. Une poutre maîtresse de la toiture est sectionnée. Les éclats ont brisés les vitres ».

Le 21 mai 1944, à Pérenchies.
Récit d’un témoin : Léon Lommez.
 « Dans l’ancienne rue de Lille  (la future rue du Général Leclerc), j’avais largement franchi le carrefour de la rue de la gare quand j’entendis le bruit de violentes explosions et de chuintement de vapeur en provenance de la gare. Je revins sur mes pas et c’est alors que je vis surgir, montant en flèche, un avion : un Hawker Tempest MKV facilement identifiable avec son grand capot de radiateur et sa grosse casserole d’hélice qui lui donne l’aspect agressif d’une gueule de requin.
On releva quelques impacts d’obus dans les murs de la maison située près du hangar Lebleu, rue de la gare.
Ce 21 mai 1944, fut appelé la journée des locomotives. Du Nord à la Loire, on attaqua de nombreuses locomotives. Cette attaque avait été précédée, dans la nuit du 9 au 10 avril 1944, du bombardement des gares de triage dont le terrible bombardement de Lille-Délivrance à Lomme qui fit même des victimes à Pérenchies.
Il est à signaler que le calvaire construit en reconnaissance d’avoir été épargné marque l’un des endroits sur Pérenchies où les bombes s’arrêtèrent ».


Léon LOMMEZ en juillet 1945
Document SPMC numéro 3 685


Tombés au champ d’honneur.
Gisèle DEBUISSON-PORTENART (septembre 2004)
«En 1936, notre famille est venue habiter au 78 ter de la rue de la Prévôté.
En 1940, nous évacuons à pied jusqu’à Saint-Venant sans notre père, retenu à la construction d’un blockhaus à Arnèke.
Comme beaucoup de gens, après quelques mitraillages sur les routes, nous sommes revenus découvrant notre maison occupée par des étrangers.
Comme on parle d’envoyer les jeunes en Allemagne, mon frère, Auguste PORTENART, né le 28 mars 1922, en compagnie de son ami Jules SIX, décide de s’enfuir pour passer la ligne de démarcation et rejoindre notre oncle près de Tours.
Léon VENNIN, garde-champêtre à Frelinghien qui avait été leur instructeur de préparation militaire en 1938, les rejoints. Ils descendent dans la Vienne et rejoignent un groupe de résistance appelé « Jacky » et harcèlent l’ennemi tout en vivant dans les bois.
Le 31 juillet 1944, ils sont en mission de ravitaillement quand on leur signale une colonne allemande. Ils se replient mais sont cernés par le détachement. Certains parleront ensuite de trahison.
Deux personnes sautent dans la rivière. Une seule en ressortira vivante après deux heures dans l’eau. Un autre se réfugie dans le cimetière où le fossoyeur, Fernand ROBIN, l’enferme dans une tombe où il restera toute la nuit mais aura la vie sauve.
Robert CANUEL, Jules SIX et mon frère Auguste PORTENART trouvent la mort sous les balles de l’occupant. Par la suite, on me remettra une photo des trois corps !
Début octobre, Mme VENNIN reçoit des nouvelles de son époux ainsi que l’annonce du décès des deux Pérenchinois et elle prévient Monsieur BOSSAERT qui faisait un peu office de Maire à Pérenchies.
Celui-ci, en compagnie d’Emile POLET, qui connaissait les deux garçons, ceux-ci ayant fait partie, durant un très court temps, du mouvement de la Voix du Nord avant de partir en France libre, vient alors annoncer l’horrible nouvelle à mes parents.
Par la suite, les corps reviendront à Pérenchies et une plaque sera apposée sur la place de Nalliers ».   




Jeunes, partis faire la guerre dont Auguste PORTENART et Jules SIX.
Ils seront abattus, le 31 juillet 1944 à Nalliers. Document SPMC numéro 3 815

Tombe d’Auguste PORTENART Fils à Nalliers (Vendée).Mention « MORTS POUR LA France »
Le corps est aujourd’hui revenu à Pérenchies.
Document SPMC numéro 3 817

Plaque du souvenir là où ils sont tombés. « A la mémoire des F. T. P. F. Robert CANUEL, Jules SIX et
Auguste PORTENART, tombés au champ d’honneur le 31 juillet 1944
Document SPMC numéro 3 818


Le 26 août 1944, la rue de la gare est atteinte !
François BAILLET (Juillet 2004).
« Nous sommes le 26 août 1944. Il est 9H30/10H du matin. La journée s’annonce bien. Je flâne car je suis en vacances.
Ma mère m’invite à me lever car des avions tournoient au-dessus de nous. Ce qu’elle ne sait pas, c’est qu’un train arrive en gare de Pérenchies. Lorsque tombent les premières bombes, nous nous précipitons dans la cave. Ma mère abandonne la cour où elle observait le manège des avions anglais, traverse l’arrière-cuisine et reçoit du plâtre du plafond sur la tête.
Dans la cave, je me retrouve en pyjama avec les employés de la poste à l’exception de mon père.
C’est alors que je m’aperçois que j’ai oublié de prendre les papiers de famille qui se trouvaient sous mon lit.
Je remonte quatre à quatre alors qu’une bombe explose à proximité. L’escalier de chêne qui conduit au premier vacille. Tant pis pour les papiers, je redescends.
Une bombe éclate dans les jardins situés juste en face de la poste à côté de la maison du cordonnier. Les vitres volent en éclats. Les billets de banque que mon père se préparait à remettre aux facteurs volent aussi. Ancien combattant de la première guerre mondiale, seul mon père ne perd pas son sang-froid. Dans le bureau, il court après les billets éparpillés, les rassemble pour les mettre à l’abri.
Les avions s‘éloignent. On saura après qu’ils n’ont touché ni la gare ni le train.
C’est alors que l’on sonne à la porte. Ma mère et moi allons ouvrir. C’est une de mes futures belles sœurs, en larmes, qui hoquète : « Nous n’avons plus de maison ! ». Je m’habille en hâte et je cours au café tenu par Madame Alfred LEBLEU.
Stupeur ! La maison n’a plus de façade, les planchers se sont affaissés les uns sur les autres du premier étage au grenier. La toiture est plus qu’ajourée. 
Narquois, un jambon était resté accroché à une poutre. L’arrière de la maison est aussi très endommagé. Une bombe est tombée sur un tas de fumier. Il est éparpillé un peu partout.
L’écurie est partiellement détruite, le cheval est mort, les poules aussi.
Seule, en plein centre de la maison, la cage d’escalier est restée intacte. Madame LEBLEU, la tenancière, ses enfants et deux ou trois clients avaient eu le temps d’y trouver refuge.
Par contre, il manque Thérèse. Hébétés, les réfugiés ne peuvent répondre.
En réalité, elle était allée, comme chaque matin, chercher le lait à la ferme tenue par Madame LEFEBVRE au bout de la rue de Lille. En apercevant le manège des avions, la fermière l’avait invitée à rester à l’abri, à la ferme. Plus tard, elle deviendra ma future femme ! »


Destruction, rue de la gare le 26 août 1944. La façade de la maison LEBLEU.
Document SPMC numéro 421


Destruction, rue de la gare le 26 août 1944. L’arrière.
Document SPMC numéro 422

Destruction, rue de la gare le 26 août 1944. Les planchers effondrés.
Document SPMC numéro 423

A suivre…
La troisième partie sera publiée le jeudi 21 mai 2020.

Philippe JOURDAN (29 avril 2020)



Les tombes militaires du cimetière de Pérenchies.
Document SPMC tombes cimetières.



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Si Pérenchies m’était contée…
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Correction et édition : Jean-Pierre COMPERE, administrateur du Blog.

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