Philippe JOURDAN
Président de "Si Pérenchies m'était contée..."
29/12/2023
Histoire d’une personne ordinaire qui a accompli des faits extraordinaires…
Didier DELIGNE, membre de notre association, participe de temps à temps à nos manifestations et nous envoie alors des photos de celles-ci. Son épouse, Geneviève, pratique la peinture et la gravure lors de ses temps libres et ouvre chaque année son atelier aux visiteurs dans le cadre de l’opération « Portes Ouvertes des Ateliers d’Artistes », organisée par le Conseil Général du Nord.
Dernièrement, il m’a raconté
une histoire extraordinaire concernant sa grand-mère, m’a envoyé des documents
et invité à une cérémonie officielle en mairie de Lille, ce 20 novembre 2022.
La grand-mère de Didier DELIGNE, Louise VIDAL, Veuve DELIGNE (04/08/1894-21/06/1978), a été désignée comme Juste parmi les Nations pour avoir caché un enfant juif, Marcel KAIZLER, durant la Seconde Guerre mondiale à Lille.
Une médaille lui a été
décernée et remise à Didier DELIGNE, l’aîné présent de la famille.
Le nom de Louise DELIGNE sera
inscrit sur le mur de monuments commémoratifs de la Shoah à Jérusalem et à
Paris.
Des descendants de Marcel
KAIZLER étaient venus spécialement d’Israël pour l’événement.
Mme Louise DELIGNE-VIDAL. Provenance : famille DELIGNE. |
Médaille et diplôme des Justes parmi les Nations décernés à Louise DELIGNE le 20 novembre 2022. Photographie Famille DELIGNE. |
Marcel KAIZLER est né en 1927
à Anvers. Il est le fils de Samuel Kaizler, né en 1893 en Hongrie, et de Eva,
née Krengel en 1894, à Anvers.
Il a une sœur dénommée Esther.
Leur père décède d’une maladie
rénale alors que Marcel n’est âgé que de 8 ans et demi.
En 1938, Esther part
s’installer en Palestine et la mère reste seule avec Marcel.
Quand la guerre est déclarée
en 1939 et que l’Allemagne envahit la Pologne, la mère prend en charge 2
réfugiés d’Allemagne, Helmut et Truda HOCHMANN, dont les parents ont été
arrêtés par la autorités belges comme étant citoyens allemands et donc ennemis
de la Belgique.
Quand les troupes allemandes envahissent la Belgique en mai 1940, commence la fuite en avant. Une personne de la famille, Berta VYLNED ainsi que son mari veulent amener tout ce monde-là à prendre un vol vers l’Angleterre mais le chauffeur de taxi supposé les amener à l’aérodrome refuse de les prendre et ils ratent leur avion. Ils retournent en Belgique avec les deux enfants HOCHMANN. Eva et Marcel se replient sur le train et arrivent après bien des péripéties à Lille. Sur place ils découvrent que les troupes allemandes les ont devancés et qu’elles occupent la ville. Selon le témoignage de Marcel, ils se sont retrouvés en ville sans savoir quoi faire quand arrive une jeune fille de 16 ans. La mère de Marcel l’interroge pour l’adresse d’un hôtel et comme la jeune fille ne sait pas, elle va chez elle pour demander à sa mère, Louise DELIGNE-VIDAL. Celle-ci les invite à venir chez elle.
Mme Louise DELIGNE-VIDAL. Provenance : famille DELIGNE. |
Louise DELIGNE est une veuve,
mère de 6 enfants, dont seulement 4 vivent avec elle à cette époque.
Les 6 enfants de Louise DELIGNE, Anne-Marie, Aimé, Paul, le père de Didier, Germaine, Marie-Thérèse et André. Provenance : famille DELIGNE. |
Elle décide de loger les
réfugiés dans l’appartement de ses voisins qui ont fui vers le sud de la
France. Elle les accueille bien qu’elle sache qu’ils sont juifs.
Un mois plus tard, les Allemands renvoient les réfugiés vers leurs lieux d’origine. Avant la séparation, Louise leur dit que si jamais ils ont besoin de quoi que ce soit, qu’ils n’hésitent pas à faire appel à elle.
La vie reprend ainsi son cours à Anvers jusqu’à que commencent les premières mesures de répression envers les juifs.
Ils doivent échanger leurs
cartes d’identité contre de nouvelles avec le tampon « JOOD ». Par prudence, la
mère conserve leurs anciennes cartes d’identité et, de temps en temps, les
utilise selon le besoin. A l’époque, Marcel et sa mère habitent chez une proche
du nom de Ernestine BRICHE.
Quand les premières
déportations débutent en 1942, arrivent des lettres des personnes arrêtées pour
demander qu’on leur envoie de la nourriture. La mère de Marcel utilise alors sa
carte d’identité vierge du tampon « JOOD » pour aller en France chercher du
ravitaillement.
Mme KAIZLER, la mère de Marcel. Document famille KAIZLER. |
Marcel ne se souvient pas
précisément de la date mais, un jour de 1942, la milice flamande vient les arrêter
alors que sa mère est absente. Il entend qu’on frappe fort à la porte et que
l’on crie son nom. Il comprend tout de suite qu’il doit se cacher et
disparaitre. Il va dans la chambre à coucher de sa mère et découvre qu’il y a
un petit espace entre le lit et le mur. Il s’y trouve quand la milice, après
avoir enfoncé la porte d’entrée, entre dans la chambre et commence à la
fouiller. Marcel retient sa respiration. Les miliciens le cherchent mais ne le
trouvent pas bien qu’ils l’aient entendu plus tôt. Ils voient alors une fenêtre
ouverte et présument qu’ils se sont enfuis par là. Ils leur semblent même voir
une ombre courir. Un des miliciens tire et ils descendent précipitamment à la
poursuite de ce qu’ils croient avoir vu. Marcel y voit un miracle, d’autant
plus que sa mère avait déplacé le lit quelques jours avant pour pulvériser du
produit sur des insectes.
Quand sa mère revient, Marcel
lui raconte ce qui s’est passé. Elle décide alors de l’envoyer immédiatement
chez Louise à Lille.
Louise connaissant bien un concierge d’un immeuble près de chez elle, le paie afin qu’il aille chercher le garçon et le ramène chez elle. Elle accueille l’enfant avec beaucoup d’affection et lui trouve un endroit pour dormir dans une pièce servant de cagibi. Il ne sortira pas de l’appartement car le danger est grand et il y reste 5 mois. Il partagera alors les jeux du plus jeune enfant de Louise, André, toujours vivant en 2022. Il est d’ailleurs le parrain de Didier DELIGNE.
Louise prend des risques énormes car elle n’est pas à l’abri d’une dénonciation de ses voisins
Après 150 jours, Mme KAIZLER vient
chercher son fils et ils se réfugient pendant quelques jours chez une famille
juive qui leur conseille de prendre contact avec la croix rouge afin d’envoyer
Marcel au Préventorium de Saint-Jans Cappel, alors géré par deux religieuses
dont Marcel ne se souvient pas des noms. Il y restera 2 ans. Pendant ce temps,
sa mère retourne en Belgique et se cache chez une veuve du nom de BLONDIAU.
A la fin de la guerre, Marcel revient à Anvers puis se joint à un mouvement de jeunesse. La même année, il décide de quitter la Belgique et part s’installer en Palestine pour intégrer le Kibboutz « Beerot Itzhaq ».
Le 16 mars 2021, Yad Vashem, Institut International pour la Mémoire de la Shoah, a décerné à Louise DELIGNE le titre de Juste parmi les Nations.
La plupart de ses descendants
découvre alors cette magnifique histoire.
Marcel KAIZLER. Provenance : famille KAIZLER. |
La maison à Lille, rue MASUREL. Google Maps. |
Quelques descendants de Louise DELIGNE devant la maison natale. Provenance : Didier DELIGNE. |
Le 20 novembre 2022, les
descendants de Marcel KAIZLER et de Louise DELIGNE se retrouvent en mairie de
Lille pour la cérémonie officielle de remise de cette distinction.
Didier DELIGNE y a également
invité Brigitte LISO, notre député, et Philippe JOURDAN, président de
l’association d’histoire locale « Si Pérenchies m’était contée… ».
Celui-ci échangera avec la
directrice de l’institution qui a remplacé le préventorium de Saint-Jans-Cappel
et avec des responsables de l’histoire locale de ce village, présents à la
cérémonie.
Celle-ci fut magnifique et pleine d’émotion. Les personnes présentes ont eu le sentiment d’avoir vécu une page historique de notre histoire nationale.
Voici quelques photographies
de celle-ci.
Cérémonie du 20 novembre 2022 à la mairie de Lille. Remise de la Médaille des Justes parmi les Nations à Louise DELIGNE. L’assemblée. Photographie Famille DELIGNE. |
Cérémonie du 20 novembre 2022 à la mairie de Lille. Remise de la Médaille des Justes parmi les Nations à Louise DELIGNE. Les familles KAIZLER et DELIGNE. Photographie Famille DELIGNE. |
Cérémonie du 20 novembre 2022 à la mairie de Lille. Remise de la Médaille des Justes parmi les Nations à Louise DELIGNE. Martine AUBRY, maire de Lille. Photographie Famille DELIGNE. |
Cérémonie du 20 novembre 2022 à la mairie de Lille. Remise de la Médaille des Justes parmi les Nations à Louise DELIGNE. Vue de l’assemblée. Photographie Famille DELIGNE. |
Cérémonie du 20 novembre 2022 à la mairie de Lille. Remise de la Médaille des Justes parmi les Nations à Louise DELIGNE. La fille de M. KAIZLER. Photographie Famille DELIGNE. |
Philippe JOURDAN, intéressé
par l’histoire d’une famille de Pérenchinois, a contacté Saint-Jans-Cappel afin
d’avoir plus d’information sur le sujet.
Il contacte alors Anthony DUTHILLEUL
qui vit dans notre commune mais exerce sa fonction de DGS à la mairie de
Saint-Jans-Cappel.
Celui-ci transmet alors la
demande à Christian MONIER, Président du Club d'Histoire Locale, qui peut,
ainsi, répondre à plusieurs de nos questions.
Le bâtiment du préventorium de Saint-Jans-Cappel, dans les années 1939/1945, se situait chemin de la glaise qui était à l'époque le seul chemin carrossable.
L’ancien bâtiment
a été détruit il y a deux ans afin
de créer des bâtiments plus adaptés aux enfants autistes.
C’est aujourd’hui un IME.
Le préventorium de Saint Jans Cappel. INTERNET. Carte postale. |
Le préventorium de Saint Jans Cappel. INTERNET. Carte postale. |
Ce préventorium était géré
par la Croix Rouge Française. La directrice emblématique était
Mme VANLANDE en particulier durant la seconde guerre mondiale.
Mme VANLANDE, directrice du préventorium de Saint-Jans-Cappel, et résistante. |
M. MONIER finalise actuellement
un livre sur le sujet avec de nombreuses photos dont beaucoup inédites. Il
travaille avec les enfants autistes et leur institutrice pour la création de
la couverture du livre qui devrait être fini début 2023.
Il est joignable sur l’adresse
suivante : clubhistoirelocalesjc@aol.com
Mlle DELIGNE, Mme KAIZLER et Mme DELIGNE après la guerre. Famille KAIZLER. |
Les descendants de M. KAIZLER, présent au centre, mais aujourd’hui décédé. Document famille KAIZLER. |
Merci à Didier
et à sa famille d’avoir invité notre association d’histoire locale à vivre cet
événement.
Réunion du 24 novembre 2022 des membres actifs de SPMC en présence de Didier DELIGNE. Durant la réunion, est évoquée l’histoire de sa grand-mère. Photographie Patricia LESSART. |
Pour conclure, retenons ces deux belles phrases citées plusieurs fois lors de la cérémonie :
« La véritable histoire est faite par des gens ordinaires qui ont vécu des moments extraordinaires ».
« Quiconque
sauve une vie, sauve l’univers tout entier ».
La médaille des Justes parmi les Nations. INTERNET. |
Philippe JOURDAN
Président de
SPMC
Le 10 décembre
2022.
Correction et édition : Jean-Pierre COMPERE, administrateur du Blog
Le monument aux morts de la Grand’Place en novembre 2020. Photo Christiane LEGRAND. Vers 2020. |
Dimanche 25 avril 2021, a été
commémoré, dans toute la France, le souvenir de la déportation et ce 8 mai
2021, on a célébré la fin de la seconde guerre mondiale.
La pandémie que nous connaissons
ne permet pas, pour la seconde année, de participer à ce devoir de mémoire
comme nous le voudrions.
Voici la suite de ces quelques
éléments de cette histoire locale et nationale que nous ne devons pas oublier.
Ces divers documents ont été commentés lors de nos réunions d’histoire locale
en visioconférence en avril 2021.
Libération de Pérenchies en septembre 1944. Quelques femmes rassemblées sur la Grand’Place célèbrent l’événement. Document SPMC numéro 2 531 Ter. |
Philippe JOURDAN
Président de l’association
d’histoire locale « Si Pérenchies m’était contée… »
5 mai 2021.
LA FAMILLE CAYZEELE ET LA RESISTANCE
Daniel CAYZEELE a fait parvenir à
notre association plusieurs feuillets rédigés par son père, Henri CAYZEELE, né
le 29 juin 1927 à Houplines, marié à Pérenchies en 1946 et par son grand-père,
Arthur CAYZEELE, né le 15 avril 1900 à Houplines.
Durant la guerre, Arthur et Henri
vivaient à Pérenchies. Tous les deux, ils participèrent à des actes de
résistance.
Arthur CAYZEELE fleuri. Document non daté. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
1er feuillet écrit par Henri. Extraits.
Henri CAYZEELE. Service national en 1947. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
« Je puis affirmer que mon
père Arthur Cayzeele fut, pendant toute l’occupation, membre des Forces Françaises de l’Intérieur. Je fus
témoin bien souvent, pour l’avoir aidé, d’actes de propagandes contre l’ennemi par
mon père (collage d’affiches, distribution de tracts, nettoyage d’armes, …). Je
me rappelle surtout de nombreuses perquisitions faites chez nous par la police
allemande… Un matin, étant seul chez moi, je gardais mes frères et mes sœurs,
deux inspecteurs allemands se présentèrent pour perquisitionner. Etant donnée
l’absence de mes parents et mon refus de les laisser entrer, ils allèrent
quêter deux témoins dont le garde-champêtre dans l’avenue du Kemmel. Après
avoir mis toute la maison et la cour, sens dessus-dessous, ils s’en
retournèrent bredouilles. Je m’empressais alors de courir à la rencontre des
parents qui arrivaient. .. »
Henri CAYZEELE et Yvonne VERSLYPE le 18 août 1959. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
Autres feuillet écrits par Arthur. Extraits.
Arthur CAYZEELE. Photo d’identité non datée. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
«C’est en fin du mois de juillet
1940 que le camarade Louis CHIEUS, d’Ennetières en Weppes, est venu me
solliciter pour organiser des groupes de résistance à Pérenchies. Je réussis à
avoir 7 groupes de trois hommes, 1 de quatre, et le mien que je formais avec
Achille TAMPERE que j’avais choisi comme homme de confiance. Nous étions donc
27 hommes et femmes. Nous distribuions et affichions des tracts patriotiques
qui étaient édités par « France d’abord ». Nous ne savions pas où se
trouvait l’imprimerie clandestine. Les tracs étaient en français et en
allemand.
Puis, Louis m’a donné l’ordre de
saboter les lignes téléphoniques. Avec prudence, nous coupions des fils vers
Pérenchies, Prémesques, Lompret, le Fort d’Englos, Lambersart et nous sabotions
des camions militaires en plaçant des clous en-dessous des véhicules
stationnés. Nous avions récupéré des fusils, des révolvers, des balles, de la
poudre que les soldats anglais et français avaient abandonnés lors de la
débâcle et les avions camouflés un peu partout, moi rue de la Pannerie, chez Jules DEGRAEVE, dans un vieux puit
abandonné près de la briqueterie, chez la vieille Madame BEAUPREZ, face à la ligne de chemin de fer au pont
Ballot, chez Edouard LOGIER au Fresnel, chez la veuve DEPOORTER à Prémesques,
chez Henri SAMSON, rue Kemmel, et à la Buvette POLET, rue de la Prévôté.
Avenue du Kemmel entre les deux guerres. Document SPMC numéro 1 203. |
On a reçu l’ordre de tout donner
aux francs-tireurs. Jules HOLLEVOET les transmettait à d’autres groupes sur
Lomme ou Tourcoing. J’ai passé 4 fusils, des révolvers et des balles à Jean
DESREUMAUX de Prémesques et à Fernand WATERBLEZ de la rue Kuhlmann et d’autres
à Jean DECROCK de la rue de la Prévôté. D’autres venaient chez moi avec un
petit sous cassé en deux comme signe de reconnaissance.
J’étais en liaison avec Louis et
Henri CHIEUS d’Ennetières, Louis PATTINIER de Lomme, Jules DEGRAEVE de
Lambersart, André PIERRARD de Bailleul, VANSTEENKISTE de Nieppe, Jules WOLLEVOET de Lomme, de Simon
de Verlinghem, de Jean DESRUMEAUX, de Roger LECERF de Prémesques, de Fernand
WATTERBLEZ, d’Edouard LOGIER du Fresnel, d’Achille TAMPERE, Grégoire VERSTRAETE
de Pérenchies ainsi que sa femme Blanche, Maurice VERBECKE.
On faisait des réunions chez moi
jusqu’au jour où je fus continuellement perquisitionné.
Le 18 septembre 1941, la police
est venue me chercher pour passer à l’anthropométrie à la mairie de Pérenchies
tellement j’étais connu. On a alors distribué les tracts en 1943 du côté de
Laventie, de la Gorgue et d’Estaires. On les collait sur les poteaux
télégraphiques pour démoraliser les soldats allemands.
J’ai aussi distribué des cartes
de ravitaillement de pain et de denrées diverses aux réfractaires ainsi qu’à
des parents de déportés. On les passait sous les portes dans des enveloppes
pour ne pas être reconnus.
Au début de 1942, j’ai pris trois
chevaux blessés par des éclats de bombes et les ai fait abattre pour donner de
la viande à la population de Pérenchies qui pourra en témoigner.
Lorsqu’on portait des messages,
nous avions un code. On se frottait la jambe droite, parfois la gauche pour se
faire reconnaître. Je me faisais accompagner d’une femme afin de paraître moins
suspect. Parfois, c’était Blanche Verstraete de la rue Philippe de Girard,
parfois Jeanne Tampère de la rue Leplay et, parfois, ma femme.
Un jour, je vis beaucoup de
soldats allemands entrer au Fort d’Englos et j’ai donc prévenu Fernand WATTERBLEZ
qui faisait partie des francs-tireurs. Il a ainsi prévenu son groupe et m’a
félicité de l’avoir prévenu.
En mars1941, je revenais de la
Mitterie où j’étais allé chercher du matériel avec ma femme et Madame DEPOORTER
qui poussait une voiture d’enfant chargée à bloc. En entrant dans la rue de la
Pannerie, ma rue, mon garçon âgé de 13 ans qui était resté soigner les plus
petits à la maison, nous voyant revenir de loin accourut pour nous prévenir que
la sureté perquisitionnait la maison. Mme DEPOORTER a eu la présence d’esprit
de faire demi-tour immédiatement et est retournée chez elle à Prémesques à la
Collerie pour camoufler le matériel. Je pris une autre direction tandis que ma
femme continuait seule pour rentrer à la maison. Je suis parti chez Mme BEAUPREZ
au Pont Ballot pour me cacher. Je la remercie.
La rue de la Pannerie entre les deux guerres. Document SPMC numéro 1 185 |
Le premier jour quand les
Allemands sont entrés dans Pérenchies, j’ai été réquisitionné par les officiers
alors que je passais rue de Lille pour aller ramasser les soldats
Nord-Africains morts à seule fin de les conduire au cimetière de Pérenchies.
J’ai conduit les blessés à l’hospice de Pérenchies où on avait installé une
infirmerie de fortune puisqu’il n’y avait plus de docteur à Pérenchies. J’ai
réussi à prendre le révolver dans la gaine d’un lieutenant français qui avait
été tué au volant de sa voiture.
Au même moment, une femme
étrangère à la ville devait accoucher. J’ai appelé mon ami DELMOTTE qui était
épicier rue Carnot pour conduire cette femme à Lille à la maternité. L’officier
allemand accepta que Madame Julia DELBECKE les accompagne. Malheureusement,
quand la voiture arriva au pavé de Pérenchies, face à la briqueterie de
Lambersart, ils furent mitraillés par des soldats nord-africains couchés en
position de tir de chaque côté de la route. Mon camarade DELMOTTE fut tué sur
le coup. S’apercevant que la voiture était occupée par des civils, leur chef
fit cesser le feu. La femme arriva juste à temps pour accoucher.
En 1944, on a chassé les
Allemands du territoire de Pérenchies. Nous avons attaqué la mairie pendant que
les Allemands nous mitraillaient en se sauvant.
Libération de Pérenchies en septembre 1944. Présence à droite d’un FFI : Michel DEBRUYNE. Document SPMC numéro 5 602 |
Nous avons occupé la mairie puis
nous nous sommes ré »unis entre tous les résistants de la commune et nous avons formé un comité de Libération
de 23 membres. Nous avons désigné un maire et des adjoints et comme membre de
la résistance FTPF, je fus nommé conseiller municipal.
Un peu plus tard, j’ai été
convoqué au bureau militaire de Lille, place du théâtre, puisque j’étais engagé
volontaire comme soldat de la 5ème compagnie, 3ème
bataillon du groupe Fontaine numéro matricule 6 072. J’ai été autorisé à
porter l’insigne FFI numéro 212,738. J’ai touché plusieurs fois une prime de
combattant de la résistance.
J’avais fait, peu après, ma
demande pour avoir la carte de combattant mais, malheureusement, j’ai négligé
de répondre au questionnaire que j’avais reçu de la Préfecture. La gendarmerie
militaire est venue plusieurs fois chez moi pour m’engager à compléter mon
dossier. Je ne m’en suis jamais occupé et mon dossier est toujours à la
Préfecture avec mes photos et je regrette de ne pas avoir continué.
Arthur CAYZEELE et deux de ses fils : Henri et Jean. Années 50/60. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
Il est à noter que mon fils Rémy
a été pris pour moi à l’âge de 18 ans par la gestapo. Il a été envoyé à la
prison de Loos pour 3 mois puis envoyé ensuite au camp de Ravensbruck en
Allemagne jusqu’à la fin de la guerre. Il fut libéré par l’armée russe après 18
mois de camp de concentration. Il fut victime de la résistance. Il faisait
partie d’un de mes groupes de trois, en triangles. Je pense que si c’était moi
qui avais été pris, je ne serai certainement plus revenu. On m’aurait peut-être
fait mourir là-bas en Allemagne comme beaucoup de mes camarades.
J’ai aussi autorisé mon fils Jean
à s’engager au début 44, à l’âge de 15 ans. Il est allé au 3ème
génie de sapeurs, 17ème compagnie et il a aussi sa carte de FFI,
ayant chassé l’ennemi de notre pays. J’ai fait et aider à beaucoup de choses
pour saboter la machine de guerre allemande à seul fin de les chasser de notre
pays. Il est assez difficile de se rappeler de tout ce que l’on a fait. On peut
toujours prendre des renseignements sur mon compte dans Pérenchies concernant
mon activité sur la résistance.
Fait à Pérenchies le 15 février
1946.»
RECHERCHE D’ARCHIVES
Arthur CAYZEELE et 4 de ses fils. Années 50/60 ? Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
En 1933, la famille Cayzeele habite rue de la Pannerie.
La famille est arrivée à Pérenchies le 5 avril 1933 venant de
Prémesques.
Arthur était né le 15 avril 1900 à Houplines. Il était ouvrier d'usine.
Il avait épousé à Armentières Raymonde Comyn le 7 août 1920. Elle était née à
Pérenchies le 30 novembre 1902. Elle était ménagère.
La famille d’Arthur CAYZEELE. Photo non datée de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
Plusieurs autres personnes sont dans le foyer :
Rémy, né le 30 01 1923 à Houplines,
Agnès, née le 05 09 1924 à Armentières,
Henri, né le 29 06 1927 à Houplines, marié à Pérenchies le 30 11 1946,
Jean, né le 26 02 1929 à Prémesques,
Christiane, née le 10 01 1932 à Prémesques,
Renée, née le 24 08 1933 à Pérenchies,
Marceau, né le 19 09 1933 à Pérenchies,
Gilbert, né le 04 09 1938 à Pérenchies,
Georges, né le 12 02 1941 à Pérenchies,
Claude, né le 18 06 1942 à Pérenchies et DCD le 18 09 1942.
Andrée, née le 11 05 1944 (? date un peu difficile à lire) à
Pérenchies.
Arthur CAYZEELE et 6 de ses fils : Jean, Georges, Rémy, Marceau, Henri et Gilbert. Photo non datée de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
LA SECTION DES
PRISONNIERS DE GUERRE
Après la guerre 1939/1945, une section d’anciens prisonniers
sera constituée à Pérenchies. Elle rassemblera entre 100 et 200 personnes.
Un drapeau sera confectionné. Il est aujourd’hui en dépôt
dans notre association.
Remise du drapeau à la section pérenchinoise des anciens prisonniers de la guerre 1939/1945, devant le monument aux Morts de la Grand’Place. Document SPMC numéro 2 775. |
Les anciens prisonniers de guerre devant la mairie. Après la guerre. Document SPMC numéro 5 874. |
Le drapeau des associations des prisonniers de guerre, section de Pérenchies 1940/1945. Objet SPMC numéro 1060 |
Quelques membres de la section des anciens prisonniers de guerre, avec le maire Roger Dutriez, lors du 8 mai 1995. Salle de l’Europe. Document SPMC numéro 6 018 |
Défilé pour le 8 mai 1945, rue de la Prévôté, devant la buvette de M. POLET. Document SPMC numéro 256. |
Défilé rue de Lille (actuelle rue du Général Leclerc) le 8 mai 1945 devant la maison du Docteur NUYTS. Document SPMC numéro 6 119. |
Cérémonie du 8 mai 1995. Stèle des anciens combattants. Document SPMC numéro 6 017. |
Cérémonie d’hommage pour la Déportation. Avril 2019. Une partie de la section UNC de Pérenchies. Photo Christiane LEGRAND. |
Philippe JOURDAN
Président de SPMC.
Avril 2021.
Logo 8 mai 1945. |
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JOURDAN. Si Pérenchies m’était contée… 67, rue Jean
MOULIN. 59840 PERENCHIES |
Le monument aux morts de la Grand'Place en novembre 2020. Photo ville de Pérenchies. |
Dimanche 25 avril 2021, a été
commémoré, dans toute la France, le souvenir de la déportation et ce 8 mai
2021, on va célébrer la fin de la seconde guerre mondiale.
La pandémie que nous connaissons
ne permet pas, pour la seconde année, de participer à ce devoir de mémoire comme
nous le voudrions.
Voici quelques éléments de cette
histoire locale et nationale que nous ne devons pas oublier. Ces divers
documents ont été commentés lors de nos réunions d’histoire locale en
visioconférence en avril 2021.
Pavoisement rue Kuhlmann à l’occasion de la fête de la Libération en 1945. Document SPMC numéro 2 501. |
Philippe JOURDAN
Président de l’association
d’histoire locale « Si Pérenchies m’était contée… »
5 mai 2021.
LE BOMBARDEMENT DE
LOMME DELIVRANCE EN AVRIL 1944
La Voix du Nord a évoqué, il y a 77 ans, dans la nuit du 9 au 10 avril
1944, le bombardement de la gare de triage de Lille-Délivrance un peu après
minuit et en deux vagues par 228 avions anglo-américains qui ont déversé plus
de 2 200 bombes détruisant les alentours et les villes voisines.
A Lomme, il y eut 4 000 maisons détruites, plus de 600 morts et
des milliers de blessés.
A Pérenchies, il y eut des
conséquences.
Document 1
Enquête après la guerre 1939/1945, rédigée par le maire de Pérenchies
en 1950.
Marie-Claude VERVISCH l’a retrouvée aux archives du Nord sous la cote 3
T 1816
- Le territoire de votre commune a-t-il été bombardé, par les alliés de
1940 à 1945 ? Oui.
A quelles dates ?
1er : le 11 avril 1944
(NDLR : selon les sources,
le bombardement a eu lieu dans la nuit du 9 au 10 avril 1944 vers minuit).
Le 2ème : le 26 août 1944.
Quel objectif visaient-ils ?
1er : gare de Lomme-Délivrance.
2ème : train en gare de
Pérenchies
Cet objectif a-t-il été atteint ?
1er : oui.
2ème : non.
Des dégâts ont-ils été commis par les bombardements alliés ? Oui.
Y a-t-il eu des maisons détruites ? 6.
Y a-t-il eu des victimes ? 6.
Document 2
La carte de la situation géographique du bombardement.
Document 3
L’évocation dans
notre Blog du 31 juillet 2019 de l’événement et des conséquences par Pierre
Haigneré, réfugié à Pérenchies en avril 1944.
« Le 10 avril 1944, un déluge de bombes
s’abattait sur la cité de Lille Délivrance et sur la gare de triage faisant un
grand nombre de victimes et provoquant d’immenses destructions dans la gare
mais surtout sur les maisons des cheminots dont plus de la moitié était
dévastée et rendue inhabitable.
Ma
famille vécut cet enfer, blottie sous l’escalier, et sortit quasiment indemne
pour rejoindre les autres habitants qui, hébétés, contemplaient la désolation
du quartier et essayaient avec des moyens dérisoires de sauver les personnes
enfouies sous les décombres.
Pendant
deux à trois jours, nous errâmes dans des abris provisoires mis à disposition
par des voisins compatissants mais il fallut rechercher un logement plus
pérenne et nous prîmes la route avec une carriole tirée par un âne emmenant le
peu de mobilier pas trop endommagé pour nous réfugier chez une vieille dame
propriétaire d’une ancienne forge au hameau du Fresnel entre Pérenchies et
Houplines composé de quelques fermes et de maraîchers.
Pierre Haigneré à l’âge de 7 ans, un an avant les faits racontés. Document SPMC. |
Ce
fut une vraie surprise pour mes parents, mes deux frères et moi-même. Agé de 8
ans, je découvrais un monde rural jusqu’alors inconnu qui ouvrait des espaces
immenses consacrés à l’agriculture et au maraîchage d’où étaient absents les
commerces traditionnels mais surtout l’école, le stade et la piscine que je
fréquentais assidûment dans mon quartier cheminot aujourd’hui anéanti.
Nous
étions devenus des « sinistrés » ou selon le cas, des
« réfugiés ». Une nouvelle vie commençait avec de nombreuses
contraintes….
Lomme
le 13 novembre 2018. »
Document 4
Ma
vie à Pérenchies pendant la guerre 39/45 par Madame
MARSELOO.
« On avait aussi hébergé pendant plusieurs mois un couple de
rescapés du bombardement de Lille Délivrance. Cette nuit-là, on s’est tous
réveillé et on s’est caché dans une petite pièce dans le noir jusqu’au matin.
Une bombe est tombée au Grand But et d’autres vers Verlinghem. On a eu très
peur. Il y avait souvent des alertes mais jamais si près ».
Mme Marseloo et sa fille et le café de la Place Document SPMC numéro 252 |
Document 5
Le
10 avril 1944, le bombardement de Lille-Délivrance par François
BAILLET (juillet 2004)
« La nuit est printanière. A la recette des
PTT à Pérenchies, tout le monde dort. Je suis réveillé par le ronronnement
d’un moteur d‘avion. Ma chambre qui est au premier étage s’ouvre par deux
fenêtres dont l’une donne rue de Lille et l’autre rue de la poste face au café
tenu par Madame Denise SAPIN. Il n’y a ni volets ni persiennes mais seulement
des doubles rideaux roses suffisamment épais pour ne pas laisser passer la lumière
électrique filtrer à l’extérieur et installés par ma mère. L’avion s’est
éloigné. Je n’entends plus le bruit du moteur.
Soudain, ma chambre est inondée d’une lueur
rougeâtre et murs et plafond s’embrasent. Je me lève, soulève les
double-rideaux. Dans le ciel, des fusées éclairantes. On voit comme en plein
jour. On perçoit le bruit vrombissant d’une première vague de bombardiers. Je
dégringole les escaliers qui conduisent à la cave.
Nous allons être bombardés, dit mon père. Cette
cave, j’en avais une peur bleue. Elle avait été bien étayée certes, mais mon
père avait décliné poliment l’offre de son voisin, le docteur Nuyts, de la
faire communiquer avec la sienne prétextant qu’en sa qualité de gérant des
fonds publics, percer le mur n’aurait pas été prudent. Pas d’échappatoire
possible donc si la maison venait à s’effondrer. Enterrés vivants ! A
cette seule idée, mon sang se glace dans mes doigts, ma bouche, mes
lèvres se dessèchent et, toujours ces vrombissements, ce sol qui tremble au fur
et à mesure que les bombes, par chapelets entiers, la défoncent. Bref, pendant
plus d’une heure, les escadrilles se succèdent, vague après vague. Que
visent-elles ? Nous n’en savons rien. Nous l’apprendrons au lever du
jour : la gare de triage de Lille-Délivrance.
Les bombes atteignent Lomme d’abord, la campagne
puis Pérenchies. La dernière est tombée au pied d’un arbre situé à l’entrée du
pré qui jouxte la propriété de Monsieur Louis Ducroquet, qui fait fonction de
maire, 1 rue de Lomme. L’arbre est déraciné. La clôture ornementale qui
limitait le terrain est gravement endommagée ainsi que le garage. Une poutre
maîtresse de la toiture est sectionnée. Les éclats ont brisés les
vitres ».
Charles LEMAHIEU,
mort dans un camp d’internement en 1945.
Document 1. Une image
mortuaire.
Sur le site de vente par correspondance DELCAMPE, une image mortuaire
a été mise en vente. Elle évoque le décès de Charles LEMAHIEU, né à Pérenchies
le 17 septembre 1924. Il vivait en Belgique..
Image mortuaire de Charles LEMAHIEU (1924-1945) Site DELCAMPE. |
Il était le fils de Georges
LEMAHIEU et d’Antoinette DECLERCQ.
Il fut arrêté par la SS allemande
le 20 juin 1943 et exilé en Allemagne le 20 janvier 1944.
Il est mort pour la patrie le 17 mars 1945 dans le camp de Siegburg.
Document 2. Les
recensements.
1906
LEMAHIEU Charles, né en 1864 à
Prémesques. Menuisier chez Agache. 26, rue de la Prévôté.
NOE Juliette, son épouse, née en
1865 à Pérenchies. Sans profession.
LEMAHIEU Louis, né en 1886 à
Pérenchies. Leur fils. Mécanicien chez Agache.
LEMAHIEU Henri, né en 1886 à
Pérenchies. Leur fils. Menuisier chez Agache.
LEMAHIEU Julia, née en 1888 à
Pérenchies. Leur fille. Bobineuse chez Agache.
LEMAHIEU Adrienne, née en 1896 à
Pérenchies. Sans profession.
LEMAHIEU Georges, leur fils, né
en 1901 à Pérenchies. Sans profession.
1911
LEMAHIEU Adrienne est épeleuse
chez Agache.
1921
LEMAHIEU Charles est contremaître
chez Agache.
65, rue Gambetta.
LEMAHIEU Georges-Paul, leur fils,
né en 1901 à Pérenchies est mécanicien chez Despatures.
1926
LEMAHIEU Georges est ajusteur
chez Agache.
7 avenue du Kemmel.
Sa femme, Antoinette DECLERCQ,
née en 1898 à Ploegsteert (B). Epicière par la suite.
LEMAHIEU Charles. Né à Pérenchies
en 1924.
Document 3. Recherches sur INTERNET.
SIEGBURG
Siegburg est une ville allemande
entre BONN et OVERATH.
On y trouvait une prison où on
rassemblait, entre autres, en attendant leur départ pour les camps de
concentration, les prisonniers NN.
LES PRISONNIERS NN, « Nuit et Brouillard ».
C’est le nom de code afin de
désigner ceux qui ont commis des infractions contre le Reich ou les forces
d’occupation dans les territoires occupés.
Le travail. Dessin d’Henri GAYOT publié dans le site BLOG ADIRP 37-41 avec l’autorisation de son fils André. Janvier 2019. INTERNET. |
Document du Ministère de la
défense. Collection « Mémoire et Citoyenneté » numéro 36. Recherches
sur Internet.
« Lancée le 10 mai 1940, l’offensive du
IIIe Reich en Europe occidentale impose à la Belgique, la Hollande, le Luxembourg,
la Norvège et la France de vivre sous le joug de l’occupant. La résistance à
l’envahisseur nazi s’organise dès les premiers mois.
Dans un premier temps, les
sanctions contre ces actions de résistance sont fortes.
Leurs auteurs font l’objet de poursuites
et sont condamnés soit à mort, soit à de lourdes peines de prison purgées en
Allemagne.
Toutefois, ces poursuites n’ont
pas le résultat escompté : les condamnés à mort deviennent des martyrs, tandis
que procès, peines de prison et peines capitales contribuent à renforcer les
cohésions nationales et la volonté de résistance.
Hitler envisage alors d’adopter
d’autres mesures à l’encontre de ces résistants occidentaux.
On publie des décrets appelés NN
(Nacht und Nebel).
Ces textes instaurent un statut
spécial pour tous les opposants qui représentent un danger pour la sécurité de
l’armée allemande et constituent des ennemis du Reich : saboteurs, communistes,
opposants politiques, responsables de réseaux, agents parachutés…
"Le décret NN doit être appliqué
aux cas : d'attentats à la vie et coups portés aux personnes ; d'espionnage ;
de sabotage ; de menées communistes ; de fomentation de troubles ; d’avantages
procurés à l'ennemi par aide portée au passage des frontières ; de tentative de
gagner les forces armées ennemies ; d'aide portée aux membres des forces armées
ennemies ; enfin en cas de détention illégale d'armes."
"Les audiences des tribunaux
en Allemagne, compte tenu des "menaces à la sécurité nationale",
doivent se dérouler à huis clos et dans le secret le plus absolu."
Ainsi, lorsque la police
allemande arrête une personne soupçonnée d’entretenir des contacts "avec
l’ennemi" dans l’un des cinq pays mentionnés, l’inculpé est traduit en
justice dans son propre pays aux conditions que l’action judiciaire puisse être
menée à son terme dans un délai de 8 jours et qu’une condamnation à mort soit
prononcée.
Si ces conditions ne peuvent être remplies, l’intéressé est secrètement déporté en Allemagne pour y être soit interné en attendant de faire l’objet de poursuites judiciaires, soit emprisonné dans un camp de concentration sous le sigle NN où il est condamné à mourir d’épuisement par le travail et les mauvais traitements.
Un débat anime les historiens sur
l’origine des termes « Nacht und Nebel ».
Sur le document en 1941, on
remarque deux initiales « NN » qui peuvent désigner plusieurs choses
: Non Nemo (personne) ou encore Norge und Nederland (Norvège et Hollande) où la
loi est d’abord appliquée pour être ensuite étendue aux 3 autres pays.
Certains historiens penchent davantage sur « L’Or du Rhin », l’opéra de Richard Wagner, qui jouit de l’admiration d’Hitler. Un personnage lance une malédiction à l’autre en s’écriant « Nacht und Nebel gleich ! » c’est-à-dire « Nuit et brouillard tout de suite !". Aussitôt, la forme humaine du personnage maudit disparaît dans une colonne de fumée.
Cette justification
"mythologique" serait l'allégorie des conditions particulièrement
épouvantables que subissent les prisonniers NN dans les lieux d'internement et de
déportation. Il faut intimider. Face aux actes de résistance et d’opposition,
un simple emprisonnement, même s’il s’agit de la réclusion à vie, est
interprété comme "un signe de faiblesse". Hitler exige la peine de
mort ou "une mesure laissant la famille et la population dans
l’incertitude quant au destin du coupable".
Dès leur arrivée au camp, les
prisonniers NN sont distingués des autres prisonniers ; les lettres NN, aux
couleurs vives, rouge ou jaune selon les catégories, sont peintes sur leurs
vêtements, les exposant particulièrement aux sévices des gardiens SS ou des
prisonniers de droit commun désignés comme surveillants des déportés.
Les témoignages concordent sur le
sort particulier réservé aux prisonniers NN, la mort, rarement évitable, par
différents moyens : la faim, le froid ou la chaleur torride, la maladie,
l’épuisement. D’une façon générale, tout était savamment pesé, calculé, pour
abêtir, avilir et faire disparaître des hommes dont la seule faute était
d’aimer et de défendre leur patrie contre l’occupant nazi. Ils sont soumis à un
régime pénitentiaire particulièrement féroce : les rations alimentaires sont
moindres que celles des autres détenus ; ils sont pendant très longtemps
interdits de soins infirmiers ; les sévices sont permanents : coups gratuits,
humiliations, jeux sadiques, exécutions sommaires ; ils subissent les stations
debout interminables sur les places d’appel ; aucune communication n’est
permise avec leurs codétenus. De plus, ils sont employés à des travaux
exténuants de terrassement, des travaux totalement inutiles, mais harassants.
Ces résistants meurent sans
gloire ni sépulture, au nom d’une dignité niée ».
AVRIL 2021. MORT
DE M. HUBERT FAURE DU COMMANDO FRANÇAIS KIEFFER.
Dans la nuit du 16 au 17 avril
2021, est décédé l’avant-dernier membre vivant du commando Kieffer, le seul
bataillon français ayant participé au débarquement sur les côtes normandes le 6
juin 1944.
Hubert FAURE et 176 camarades
avaient participé à cet épisode important de notre histoire nationale.
Il est mort à l’âge de 106 ans.
Le dernier survivant, Léon
GAUTIER, est aujourd’hui âgé de 98 ans.
Hubert FAURE, membre du commando KIEFFER vers 1944. Document INTERNET. |
Hubert FAURE, membre du commando KIEFFER lors de l'inauguration de sa rue dans sa ville natale de Neuvic Document INTERNET |
LE RESEAU VOIX DU NORD COMMEMORE SES 80 ANS
En avril 1941, il y a 80 ans, était publié le premier numéro de La Voix du Nord, un journal clandestin rédigé par Jules NONTOUR et Natalis DUMEZ. 65 exemplaires seront imprimés pour être distribués. La date présumée serait le 1er avril 1941 mais celle-ci ne figure pas sur le document. On ne sait pas non plus où il fut fabriqué. On suppose qu’il s’agissait du quartier de Fives à Lille.
Logo VOIX DU NORD. 5 mars 1942. Document INTERNET. |
|
En 1943, il sera tiré à
15 000 exemplaires.
M. DUMEZ sera arrêté et déporté
en septembre 1942.
Natalys DUMEZ. Résistant. Document INTERNET. |
M. NOUTOUR est arrêté en
septembre 1943. Il mourra en déportation en 1945.
Jules NOUTOUR. Résistant. Document INTERNET. |
Le 5 septembre 1944, il paraît au
grand jour sous le numéro 66 dont le rédacteur en chef est Jules HOUCKE.
Jules HOUCKE. Résistant. Document INTERNET. |
Plusieurs Pérenchinois vont
s’illustrer dans le réseau VOIX DU NORD. Vous pouvez lire leurs actions dans
les nombreux ouvrages réalisés sur ce thème ou dans les musées qui évoquent ce
sujet comme au Musée de la résistance du Fort de BONDUES.
N’hésitez pas non plus à relire
le dossier en trois parties réalisé en mai 2020 sur le thème de l’histoire de
la guerre 1939/1945 à Pérenchies que vous pouvez découvrir sur notre Blog.
Le Bleuet de France. |
Philippe JOURDAN
Président de SPMC.
Avril 2021.
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Correction
et édition : Jean-Pierre COMPERE, administrateur du Blog