Cette année, le vendredi 8
mai 2020, nous devions commémorer le 75ème anniversaire de
l’Armistice de 1945.
Mais, en cette période de
confinement, le gouvernement a interdit toutes les cérémonies patriotiques et
les rassemblements.
Le Devoir de mémoire
s’exercera donc par un pavoisement (installation du drapeau tricolore) sur
l’hôtel de ville et un dépôt d’une gerbe de fleurs au Monument aux Morts de la
Place du Général de Gaulle par Mme le Maire accompagnée d’un porte-drapeau de
l’UNC, section locale.
Le monument aux morts de la Place du Général
de Gaulle à Pérenchies.
Document internet « www.les
communes »
|
Nous vous proposons, grâce à
notre blog d’histoire locale, en ce 8 mai 2020, de revivre l’époque de cette
seconde guerre mondiale à travers les photographies et les textes réalisés par
les habitants de Pérenchies qui y vivaient. Une deuxième partie sera publiée le
jeudi 14 mai 2020 puis une dernière le jeudi 21 mai 2020.
Ainsi s’exercera ce Devoir de
Mémoire essentiel pour notre société.
1939/1945, une guerre cruelle et mondiale
Pour commencer, un
petit rappel sur la guerre 1939/1945
grâce aux fiches pédagogiques « Que faut-il savoir sur la guerre
1939/1945 », recueillies sur internet.
« Depuis
la fin de la Première Guerre Mondiale en Allemagne, la population s'appauvrit
et le pays tombe dans la ruine à cause des sanctions que lui a infligées le Traité de Versailles. Adolf Hitler,
homme politique, va prendre le contrôle en Allemagne, afin d'appliquer ses
idées antisémites que l'on peut lire dans son livre intitulé « Mein Kampf ». Il veut aussi
redorer le blason de l'Empire allemand et conquérir le monde sous l'égide de la
"race aryenne".
Il
accède à la chancellerie en 1933 et commence l'armement de son pays dès 1935
après être devenu Führer du Reich.
Il réalise, dès 1936, une alliance
avec l'Italie et le Japon. Fort de celle-ci, le peuple japonais envahit
dès 1937 la Chine : la guerre a déjà commencé sans que personne ne s'en rende
compte.
Hitler
s'y met lui aussi en envahissant l'Autriche l'année suivante (l'Anschluss) et exprime des
revendications sur les Sudètes et la Tchécoslovaquie. La conférence de Munich de septembre 1938 est un
échec car Chamberlain et Daladier n'osent s'opposer à Hitler qui annexe donc
les Sudètes.
Le
23 août 1939, le pacte germano-soviétique est signé entre Hitler et Staline.
Cela signifie une non-agression entre les pays, mais aussi une clause secrète :
l'invasion et le partage de la Pologne.
Le 1er septembre 1939,
Hitler envahit la Pologne, alliée à la France.
Le
3, la France et le Royaume-Uni déclarent la guerre à l’Allemagne.
A
la fin du mois, la Pologne est totalement conquise. Il faudra attendre le 10
mai 1940 pour qu'Hitler lance ses armées à la conquête de l'ouest : les
Pays-Bas, la Belgique et la France.
En
très peu de temps, les Allemands réalisent une percée qui n'avait pas du tout été
prévue.
Le
14 juin 1940, Paris est prise et 2 jours plus tard est nommé à la présidence du
conseil le Maréchal Pétain qui
déclare à la radio qu’il faut cesser les combats.
Le Général de Gaulle refuse cette cessation des
combats et gagne la Grande-Bretagne. Le 18 juin, il lancera de Londres un appel
à la radio peu entendu. Mais, ce message va se répandre et lancer les bases de
la future résistance française.
Le
22 juin, est signé un armistice à
Rethondes qui divise la France en 2 : le nord contrôlé par la Wehrmacht
allemande ; le sud dit "libre" contrôlé par le régime de Vichy.
L'occupation en France commence tandis que la Grande-Bretagne résiste seule aux
envahisseurs nazis et fascistes avec à sa tête le premier ministre Winston
Churchill.
De
1940 à 1941, les Anglais résistent et la bataille aérienne se termine par un
abandon pur et simple des nazis pour partir envahir d'autres contrées.
Pendant
l'année 1941, les états fascistes
enchaînent les succès :
·
L'Allemagne
envahit la Norvège et bénéficie de ses mines de fer,
·
En
septembre, le pacte tripartite est signé avec l'Italie et le Japon qui sont
rapidement rejoints par la Roumanie, la Bulgarie et la Hongrie,
·
L'Italie
attaque la Grèce et la Somalie britannique,
·
Le
Japon s'empare de l'Indochine française,
·
Le
22 juin, les Allemands envahissent l'URSS puis entrent en Grèce et en
Yougoslavie,
·
Les
Allemands prennent le relais des Italiens en Afrique,
·
Les
Japonais coulent la flotte américaine de Pearl Harbor le 7 décembre.
En
1942, l’Allemagne occupe toute la France, par peur des débarquements alliés
en Méditerranée depuis l’Afrique. Les
nazis y imposent leur loi et forcent à collaborer avec eux, ce que Pétain
encourage. En France, la population se divise en trois parties :
-
les collaborationnistes qui participent à la politique nazie/du
régime de Vichy,
-
les résistants comme
Jean Moulin qui, par leurs actions secrètes, font passer des informations,
bloquent les projets allemands et dynamitent des voies ferrées pour empêcher le
ravitaillement allemand,
- les autres qui subissent le régime.
L'attaque japonaise de la base navale de Pearl Harbor entraîne
nécessairement l'entrée en guerre des États-Unis contre le Japon et donc contre
ses alliés de l'Axe. Fin 1941, la guerre est bien devenue mondiale et l'Axe
domine pour le moment les batailles et les territoires. L’armée japonaise
continue sa percée foudroyante en Asie en prenant les Philippines, l'Indonésie,
Singapour et les îles Salomon et menace également l'Inde et l'Australie pendant
que les Américains se préparent. Sur le front Ouest, 6 000 Canadiens débarquent
à Dieppe en août mais plus de 3 000 sont tués ou faits prisonniers...
Après
la bataille de Stalingrad (septembre
1942 - avril 1943), les soviétiques reconquièrent l’Europe de l’Est.
Ainsi,
les nouveaux alliés que sont l'URSS, les États-Unis, les Anglais et le Canada,
attaquent les nazis par l'est et l'ouest.
Malheureusement,
pendant ce temps, les populations occupées souffrent.
En
1942, l’Europe est entièrement sous contrôle nazi. Les lois totalitaires nazies sont
appliquées partout : contrôle de la population (gestapo, délation), déportation
des juifs et des opposants, rationnement en faveur de l’Allemagne.
En
1943, la LVF (Légion des
Volontaires Français contre les Russes) et le STO (Service du Travail Obligatoire) sont
créés. Des jeunes Français s’engagent pour lutter avec les Allemands contre les
Russes. D’autres sont obligés de partir travailler en Allemagne.
La
Milice française remplace la Gestapo allemande
en zone sud.
Les
conditions de vie dans les pays occupés par l’Allemagne deviennent très
difficiles, notamment pour les populations juives qui sont traquées. En effet,
fin 1941 et début 1942, les nazis commencent également l’extermination (un
génocide) de la population juive d'Allemagne et des territoires occupés. Ils
mettent au point en janvier 1942 la « Solution Finale ». Les juifs sont exécutés sur place ou
conduits dans des camps d'extermination pour les gazer. En 4 ans, c'est plus de
6 millions d'innocents qui sont massacrés comme des bêtes. La France joue
d'ailleurs un rôle dans cette élimination car le régime de Vichy va encore plus
loin que les nazis en envoyant les enfants aux camps. En juillet 1942, a lieu
la Rafle du « Vél
d'Hiv » à Paris, une immense arrestation de Juifs en France. Il
s'agit du pire génocide jamais perpétré de l'Histoire et les conditions de
ce massacre furent
bien plus qu'inhumaines.
Fin
1942, la France "libre" est envahie par le reste des troupes nazies
et ainsi plus aucun citoyen français n'a
le choix : il doit collaborer ou résister.
Du
côté militaire, l'année 1943 est une réussite pour les alliés, que ce soit
pour Staline sur le
front Est ou pour Roosevelt sur
le front Sud comme en Sicile en Juillet.
Benito Mussolini est démis de ses
fonctions de Duce et arrêté par le roi Victor-Emmanuel III à la fin du mois. Il
est ensuite libéré par un commando allemand et constitue un îlot de résistance
dans le Nord de l'Italie. Toutefois, cela n'empêche pas l'Italie, dirigée alors
par le Maréchal Badoglio, de rejoindre les Alliés contre l'Axe.
En
1944, Churchill et Roosevelt mettent au point un plan pour libérer la France
tout en soulageant les troupes Soviétiques sur le front de l'Est qui faisaient
en quelque sorte tout le travail face aux armées allemandes.
C'est
le 6 juin 1944 qu'a lieu le Débarquement
en Normandie sous le nom de code d'Opération Overlord. Avec l'aide de la
résistance qui bloque l'arrivée de renforts allemands, la percée anglo-saxonne
fonctionne mais au prix de très nombreuses victimes. Cherbourg est prise le 29 juin afin qu'il
soit plus aisé de débarquer des troupes et du matériel. Les Allemands sont
rapidement pris en étau à partir du 15 août, date à laquelle les Alliés
débarquent en Provence.
Le
25 août, Paris est libérée et
Charles de Gaulle y prononce un discours mémorable.
Les
Allemands, en se repliant, commettent des massacres terribles tel que celui d'Oradour-sur-Glane tandis que
l'URSS entre en Pologne, en Roumanie, en Bulgarie et finalement en Allemagne.
Fin
1944, la France est quasiment entièrement libérée grâce au Maréchal Leclerc et la 2ème Division
Blindée.
Les
collaborationnistes et miliciens sont jugés par des tribunaux. Des femmes sont tondues pour avoir
collaboré. C’est aussi l’occasion de règlements de comptes qui ne sont pas
toujours justifiés.
En
1945, l'Allemagne résiste encore un temps mais, après le suicide d'Hitler qui précède
l'exécution de Mussolini, un armistice est signé le 8 mai 1945.
C'est
aussi cette année-là que les troupes soviétiques découvrent les camps de
concentration et notamment Auschwitz ainsi
que les atrocités qui y ont été commises.
L'Europe
est libérée mais les combats continuent dans le Pacifique. Les Japonais
résistent encore, mais les Américains ont une arme de destruction massive à
disposition : ils lancent 2 bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki en
août, causant plus de 200 000 victimes civiles et la capitulation du Japon.
Les
prisonniers et les déportés commencent à rentrer chez eux. Des villes ne sont
plus que des ruines. Tout est à reconstruire…. Les pertes sont énormes.
Les
vainqueurs alliés se partagent le monde en zones d’influences. Cela renforce la puissance de l’URSS et des
États-Unis. L’Europe est détruite par les bombardements. L’Allemagne,
l’Autriche et le Japon sont occupées par les Alliés. Leur armée est supprimée.
L’ONU est chargée de favoriser le dialogue entre les nations et d’éviter une
autre guerre.
La
population est traumatisée par l’ampleur des massacres (bombe atomique, camps
de concentration, génocides, …).
Le
tribunal de Nuremberg juge
les crimes contre l’humanité commis par les nazis et le tribunal de Tokyo ceux
commis par les Japonais.
Le
bilan est désastreux : 50 à 60 millions de victimes dont une majorité de
civils.
L’histoire se déroule aussi à Pérenchies.
La seconde guerre mondiale.
Résumé d’histoire locale réalisé par l’association « Si Pérenchies
m’était contée… »
Le 3 septembre
1939, la France et l’Angleterre entrent en guerre contre l’Allemagne, dirigée
par Adolf Hitler. Dès octobre, des troupes anglaises s’installent dans notre
région pour renforcer notre armée.
En mai 1940,
l’armée allemande occupe la France. L’armée française est anéantie. La
population du Nord se retrouve sur les routes de l’exode.
De nombreux
Pérenchinois, engagés dans l’armée française, sont alors faits prisonniers.
Leur absence modifiera considérablement la vie quotidienne. Les femmes, restées
seules dans la ville, durent pallier aux problèmes de tous les jours.
Des tickets de
rationnement sont distribués tous les mois à la mairie. Le ravitaillement ne
permet que 300 grammes de viande ou de graisse et un kilo de pomme de terre par
semaine. Quand on n’en a pas assez, on en achète au marché noir. On fait la queue chez les commerçants. A
Pérenchies, les boucheries ont été rassemblées en une seule. Une fois, de la
viande avariée y fut vendue. De nombreuses personnes se retrouvèrent malades.
Les boulangeries donnaient 150 g de pain par jour et par personne. On essayait
alors de faire le tour des fermes des environs pour quelques denrées bien
maigres. Il était difficile de cultiver les jardins par peur des avions.
Pour se
chauffer, on allait chercher de la poussière de charbon dans les mines.
Certains se rendaient à Lille faire la queue toute la journée aux abattoirs
pour essayer d’avoir au marché noir une langue de bœuf.
Il y avait
aussi les soldats à nourrir. En 1940, des troupes anglaises stationnent à
Pérenchies ainsi que des troupes françaises. Maintenant, c’est aux troupes
allemandes. Les personnes qui avaient un lit de libre étaient obligées de les
héberger. Des troupes avaient été installées à la salle des fêtes, au cinéma
des familles (rue Carnot) et à la maison de retraite. Des prisonniers se
trouvaient aussi rue Gambetta.
Une fois par
mois, la commune organisait un service de colis pour les prisonniers qui se
trouvaient en Allemagne ou en Prusse.
Ils travaillaient dans des fermes ou dans des fabriques. Parfois,
quelques lettres et un colis arrivaient. Certains se trouvaient dans des camps.
La vie y était pénible. Des sévices y étaient parfois pratiqués. La nourriture
manquait. Il n’était pas possible de s’en échapper car c’était alors le camp
disciplinaire.
Pendant ce
temps, la vie continuait à Pérenchies. Les enfants de la paroisse partaient
pour leur colonie annuelle au Mont des Cats.
Dès 1940, des
Pérenchinois tentent de répondre à l’appel du Général de Gaulle. Des actes de
résistance ont lieu dans les environs de la ville. Emile Polet, Henri Wuidin,
Maurice Vanhonacker, Jules Delforce, Raymond Beaussart, Yves Page, Appolon
Facon, Fernand et Denise Sapin, et
d’autres, y participèrent.
Le monument aux
morts de notre commune porte aussi les noms suivants : Gérard Ardaens,
Jean Léturgie, Jules Six, Paul Deronne, Joseph Nevians, Roger Lecerf, Auguste
Portenart et Louis Catteau, sans oublier les militaires morts pour la France,
les déportés du travail et les victimes civiles.
(NDLR. Qu’un
hommage leur soit rendu ainsi qu’à toutes les personnes dont le nom ne figure
pas sur un monument ou dans ces pages mais dont les actions sont aujourd’hui
inscrites dans l’Histoire de notre commune).
Le 1er
avril 1941, le journal de la résistance française, LA VOIX DU NORD, est créé.
Plusieurs
Pérenchinois feront partie de ce réseau de résistance.
En 1942, Marcel
Fertein, qui avait tenu auparavant le café de la gare et qui habitait alors
Wattignies, participe à la création du réseau de résistance « Sylvestre
Farmer » avec le capitaine Michel. (En 1944, Mme Fertein et son fils
trouveront refuge à Pérenchies).
D’importants
sabotages ont lieu dans la région.
L’armée
allemande ne cherche pas à détruire le potentiel économique de la région. Elle
s’efforce, afin de l’utiliser, de le remettre en fonctionnement. L’occupant
essaie aussi d’utiliser la main-d’œuvre disponible.
Les jeunes
Français sont alors réquisitionnés pour le Service du Travail Obligatoire
(S.T.O.). Ils partent pour l’Allemagne
ou pour le mur de l’Atlantique afin d’y construire des blockhaus et ainsi
renforcer les défenses allemandes. A Vendresse, dans les Ardennes, un chantier
forestier avait été créé au début de l’année 1942 par les Usines du Nord. Sous
prétexte d’y travailler le bois nécessaire au fonctionnement des mines de Lens,
celui-ci permettait surtout aux jeunes de ne pas partir pour le S.T.O.
Henri Claude
Tardif, qui s’occupait des loisirs des jeunes de l’usine Agache, en devint le directeur.
Des actions de résistance y auront lieu. Le 20 septembre 1943, 11 personnes
seront fusillées et 40 déportées dont M.
Tardif.
Certains
habitants essaieront de fuir les misères de la guerre. Tout ce qui pouvait être
emmené fut chargé sur une voiture ou dans une charrette. Les matelas
protégeaient des tirs des avions. Dans les environs, les fermes étaient
abandonnées. Les vaches criaient. Souvent, la route était bloquée. Alors, on
faisait demi-tour. On retrouvait alors sa maison dévastée et pillée.
A Pérenchies,
en mars 1943, des wagons alimentaires sont incendiés et le 7 mai, 7 citernes
d’essence sont détruites.
D’autres
actions auront lieu. Le 22 décembre, 17 wagons sont sabotés et le 28 février
1944, la voie ferrée entre le pont Ballot et le pont de la Petite Belgique est
sabotée. Des étoiles de fer seront aussi semées sur les routes pour provoquer
des crevaisons.
(En 1944, elles
étaient fabriquées chez Vrolant à Pérenchies).
Des
arrestations sur dénonciations ont aussi lieu dans la commune. Certains
sympathisent avec l’ennemi. D’autres sont enfermés à la prison de Loos ou
emmenés en déportation. Pour ces familles commence alors un véritable calvaire.
Parfois, l’espoir renaît. Elles obtiennent une permission de visite et
découvrent l’horreur de l’emprisonnement et de la torture. Mais la plupart du
temps, c’est l’incertitude. On ne sait pas ce qu’est devenu son père ou son
mari. Des condamnations à mort sont prononcées.
Des
perquisitions ont lieu. On fouille les maisons. On recherche ceux qui
résistent.
Le 10 avril
1944 a lieu le bombardement de Lille Délivrance faisant plusieurs centaines de
tués. Cette nuit-là, les Pérenchinois ne
dormirent pas ! Plusieurs réfugiés viendront habiter notre commune.
Le 11 juillet
1944, un avion est abattu. Un soldat américain, le sous-Lieutenant CRAWFORD,
sautera alors en parachute. Marcel Bulcke risquera sa vie en le cachant, alors
que la Gestapo le recherchait. .
Le 26 août
1944, un bombardement qui visait un convoi basé en gare de Pérenchies
provoquera la mort de 5 personnes dont deux jeunes enfants. Quelques immeubles
seront détruits rue de la Gare, rue de la Poste et rue Jacquart.
La ville va
connaître un peu avant sa libération un événement qui aurait pu mettre en péril
la vie de tous ses habitants. Afin de récupérer un fusil, un Pérenchinois tenta
de prendre l’arme d’un soldat allemand assoupi dans le café de la Gare.
Celui-ci se réveilla et tira sur le Pérenchinois qui riposta. Le soldat
allemand fut touché mortellement. Le docteur Nuyts fut appelé pour soigner le
blessé.
La ville ne dut
sa sauvegarde qu’au sang-froid de Rémy Beuvet qui, passant alors, eut
l’initiative de cacher la dépouille du soldat dans sa charrette et de l’emmener
jusqu’au cimetière, pour l’enterrer, évitant ainsi des représailles à toute la
population.
Quelques jours
avant la Libération, des Allemands, en camion, pris de panique, mitraillèrent
la rue de la Prévôté. Heureusement, il n’y eut aucun blessé.
Lille fut
libérée le 4 septembre 1944. A Pérenchies, on entendait encore tirer.
Le 6 septembre
1944, notre ville connut sa plus belle journée : la Libération. Des
soldats anglais sont arrivés avec des chars. Ils distribuaient des bonbons et
du chocolat. Les cloches se sont mises à sonner. Cette journée fut endeuillée
par la mort d’un FFI qui traversait les jardins ouvriers de la rue Carnot et
qui y fut abattu.
Deux autres
Pérenchinois trouveront aussi la mort lors de ces journées de combat à Laventie
et à Lambersart.
A Pérenchies,
comme dans les autres villes, tout le
monde sortait dans la rue. On chantait, on s’embrassait. On offrait aussi des
fleurs aux soldats perchés sur leurs véhicules. C’était la joie. Après 4 années
de guerre, on était libres.
A Pérenchies,
il y avait eu plus de 150 prisonniers. Progressivement, sur une année, ils sont
rentrés. A chaque retour, le quartier pavoisait.
Certains
étaient méconnaissables et ne voulaient pas raconter ce qu’ils avaient vécu.
Il y eut aussi
quelques arrestations pour collaboration et quelques femmes tondues pour
relations avec l’ennemi.
Le 8 mai 1945,
eut lieu la première fête de la Victoire. Toute la population se rassembla sur
la Place.
Célébration de la fin de la guerre
1939/1945. Photographie non datée.
Peut-être la Fête de la
Libération ?
Document SPMC numéro 2 534
|
Célébration de la fin de la guerre
1939/1945. Photographie non datée. 1945 ?
Document SPMC numéro 2 953
|
Le 2
septembre 1945, on inaugura le Calvaire
en remerciement. Ce fut une fête très importante.
Le 2 septembre 1945, inauguration du calvaire de Pérenchies.
La bénédiction du Monument.
Document SPMC numéro 2 408
|
A l’occasion de la deuxième fête de la Libération du 6
au 8 septembre 1946, on accueillit à Pérenchies les soldats anglais du 97ème
Royal Artillerie.
Réception en mairie de Pérenchies
avec la présence de soldats britanniques.
Non daté. Peut-être 1946.
Document SPMC numéro 2 424
|
Le 12 septembre
1945, Alphonse Lévêque fut le dernier prisonnier à rentrer.
Puis, la vie
reprit son cours. Plusieurs prisonniers moururent des suites de la déportation.
Certaines victimes de cette guerre sont aujourd’hui inscrites sur le Monument
aux Morts de notre commune. D’autres n’y sont pas. Certains faits sont
aujourd’hui connus, d’autres demeurent et demeureront toujours dans l’ombre.
Néanmoins, aujourd’hui, notre pays est un pays
libre ».
Mes souvenirs de la guerre 1939/1942.
Roger GABET (octobre 2004)
Ce
vendredi 1er septembre 1939 est une belle journée de fin d’été. Un
soleil généreux inonde la campagne où la moisson est achevée. Les cultivateurs
vont commencer à engranger la récolte en vue du battage. Les écoliers disposent
encore d’un mois de vacances avant la rentrée ; le moment est donc venu
pour les garçons de s’ébattre dans le chaume pour voir monter, si le vent est
favorable, le cerf-volant que la plupart ont confectionné eux-mêmes. Dans les
potagers que les ouvriers ont soigneusement entretenus au cours des congés
payés dans l’espoir d’obtenir un prix au concours de jardins, les légumes
abondent couronnant six mois d’effort et de travail réguliers.
Il
est 13 H, le cornet de l’usine Agache
lance son premier appel à la reprise du travail. Contrairement à l’habitude les
rues de Pérenchies sont désertes. Les habitants se sont groupés chez ceux
d’entre eux qui possèdent un appareil de T.S.F., à l’écoute des nouvelles.
Comme on s’y attendait le journal radiodiffusé commence par l’annonce de la
mobilisation générale.
C’est
seulement quand le second appel du
cornet retentit à 13 h 25 que les ouvriers des Etablissements Agache se
retrouvent dans les rues et se dirigent en forçant l’allure vers l’usine. En
marchant, les femmes conservent le mouchoir à la main pour s’éponger les yeux. Parmi les hommes, ceux
qui se rendent pour la dernière fois à leur poste de travail avant de répondre
dès demain à l’appel de mobilisation, sont graves. Personne n’arrivera à
l’heure au travail mais aujourd’hui, en raison des circonstances, les gardiens
ne fermeront pas les « grilles » de l’usine à 13 H 30 pour refouler les retardataires.
Le
soir, dans les rues, sur les pas de portes, dans les jardins, les conversations
ne portent que sur la situation désespérée et la mobilisation. Les numéros de
fascicule et les noms de casernes et d’unités reviennent sans cesse dans les
dialogues. Beaucoup de réservistes doivent se présenter dans une caserne de
Lille avant d’être dirigés vers le corps auquel ils sont affectés. Pendant
plusieurs jours on verra des réservistes rentrer le soir à leur domicile en
tenue civile. Ils expliqueront à leur famille et aux voisins étonnés que
l’armée ne dispose pas assez d’uniformes pour les équiper et que les casernes
ne sont pas prêtes pour accueillir tous les hommes. Il faudra attendre quelques
jours avant l’incorporation de tous les rappelés.
Le
lendemain de l’application de l’ordre de mobilisation générale, le dimanche 3
septembre, l’Angleterre et la France déclarent successivement la guerre à
l’Allemagne.
Désormais,
les femmes de soldats devront assurer seules la vie du foyer et pour certaines
d’entre elles, la marche de leur commerce. Beaucoup rechercheront un emploi car
il paraît difficile de vivre avec la seule allocation militaire.
Dans
les semaines qui suivront, quand des soldats bénéficieront d’une permission le
temps d’un week-end, on pourra constater que la tenue kaki a définitivement
remplacé la tenue bleu horizon et subi quelques modifications. Si la vareuse et
la capote n’ont pas changé de coupe depuis la fin de la première guerre
mondiale, le pantalon a été remplacé par un pantalon de golf réduisant ainsi la
hauteur des bandes molletières.
Soucieux
de la protection de la population civile, les
pouvoirs publics ont mené dès la déclaration de guerre, par la T.S.F.,
les journaux et par voie d’affiches, une campagne d’information sur la conduite
à tenir lors des opérations de guerre. Des chefs d’îlots furent désignés parmi les hommes non mobilisés. Leur rôle
consistait à faire appliquer dès le déclenchement d’une alerte les consignes de
sécurité et de sauvegarde exposées sur une affichette que chaque habitant était
tenu d’apposer sur la face intérieure de la porte d’entrée de sa maison.
Si on craignait les bombardements aériens devenus
redoutables avec les grands progrès de l’aviation réalisés depuis 1918, on
avait une peur encore plus grande des gaz qui avaient fait mourir tant de
combattants et affecté irrémédiablement les voies respiratoires de tant
d’autres au cours du précédent conflit. Des communes ont distribué à leur
population des masques à gaz pour la prémunir contre une éventuelle émanation
du redoutable fluide. Ce ne fut pas le cas à Pérenchies. Mais les Ets Agache en
ont fourni à tous les membres de leur personnel. Les ouvriers et employés de
l’entreprise effectuaient le trajet entre leur domicile et l’usine en portant
en bandoulière la boîte cylindrique en tôle contenant le masque protecteur et,
du moins le croyait-on, salvateur. Sur le lieu de travail ils devaient le
garder à portée de main afin en cas d’alerte, de se l’appliquer avant de courir vers les
abris.
A ceux qui n’avaient pas de masque, les consignes de
protection stipulaient qu’il fallait avoir en permanence dans les maisons des
serviettes de toilette soigneusement pliées plongées dans un récipient d’eau
prêtes à appliquer sur le visage pour protéger la bouche, le nez et les yeux.
Pour se protéger des bombardements, il fut décidé de
creuser des abris. Le dimanche qui suivit la déclaration de guerre, très tôt le
matin, les hommes non appelés sous les drapeaux auxquels se sont joints des
jeunes de moins de vingt ans, se mirent à l’ouvrage où il y avait un terrain
assez vaste près d’une cité. Pour les rues Kuhlmann et Ampère, on a creusé une double rangée de tranchées en zig-zag dans le champ voisin
à la grande désolation de l’exploitant,
un petit maraîcher. Pour supporter le recouvrement de terre de l’abri, on
récupéra les palissades en bois qui entouraient le terrain de football. D’autres
tranchées ont été creusées dans le parc Agache devenu une friche depuis la
destruction du château pendant la guerre de 1914, pour la protection du
personnel de l’usine.
Les matériaux manquèrent pour assurer le soutènement
des parois. A la suite des grandes pluies d’automne, malgré la coupe évasée des
tranchées d’une profondeur d’environ 2 mètres, les côtés s’écroulèrent comblant
partiellement l’ouvrage inondé.
Craignant une surpopulation des abris au cours des
alertes ou considérant une trop longue distance pour s’y rendre, des habitants
s’en aménagèrent un dans le jardin situé derrière leur maison. Malgré tous les
soins apportés, ces ouvrages familiaux comme les ouvrages collectifs furent
inondés et s’écroulèrent. Il fallut attendre le dégel pour remettre les
terrains en état, un froid intense s’étant abattu sur la France dès le début de
décembre.
Pour faciliter l’évacuation en cas d’alerte, des
édifices publics furent dotés d’ouvertures supplémentaires. C’est ainsi qu’à
l’église de Pérenchies une porte de sortie donnant sur le square du monument
aux morts a été percée dans un mur de la chapelle Nord qui tient lieu de
transept.
L’application de la défense passive imposait de
sévères restrictions sur l’émission de la lumière. A partir de la déclaration
de la guerre, l’éclairage des rues a été supprimé et les habitants étaient
tenus à la tombée de la nuit de fermer les volets et d’appliquer aux fenêtres
qui n’en étaient pas pourvues d’épais rideaux ou, à défaut, de
couvertures. Les vasistas et les fenêtres de toit devaient être badigeonnés en
blanc d’Espagne coloré de bleu. La face des phares des voitures automobiles
ainsi que celle des lanternes des vélos ont été recouvertes d’un cache
métallique comportant une étroite fenêtre laissant passer un liseré de lumière.
Pour faciliter le repérage des bicyclettes dans l’obscurité par un usager plus
rapide, il a été décidé de peindre en blanc sur une longueur d’environ 30 cm
l’extrémité du garde boue arrière de ces véhicules à deux roues.
Dans le but de les rendre plus résistantes à la
déflagration causée par les explosifs tirés par l’artillerie ou
lancés d’avions bombardiers, il était conseillé de quadriller les vitres et
glaces avec des rubans de papier collant. Ainsi, même brisées celles-ci ne devaient pas se
disloquer. Cette mesure a été principalement appliquée par les commerçants sur
les glaces des vitrines des magasins.
Observées à la lettre pendant les premiers mois de la
guerre, toutes ces consignes ont, peu à peu, sauf pour l’éclairage, été suivies
avec plus de souplesse. Certaines, comme le port du masque à gaz ont été
abandonnées. Les bandes de papier
décollées après plusieurs lavages des vitres et sous l’effet de la
pluie, ont disparu des vitrines.
Pour clore ce retour sur les mesures de protection
civile, il faut encore rappeler une mesure d’hygiène préventive qui a consisté
pendant l’automne 1939 à soumettre la population à un rappel de vaccination
antivariolique. Etalée sur plusieurs jours, elle a été pratiquée par les deux
médecins de la ville dans une salle de la Mairie.
Des avions allemands de reconnaissance
survolaient parfois à haute altitude le
territoire français. Probablement intéressés par l’usine Agache et la voie de
chemin de fer, on en vit à fréquence espacée au-dessus de notre ville. La
D.C.A. (défense contre avions) stationnée dans les environs se mettait en
batterie pour tenter d’abattre l’appareil ennemi. On pouvait alors voir dans le
ciel un groupement des boules de fumée noire laissées par l’explosion des obus,
qui s’effilochaient lentement et disparaissaient. Dès qu’un avion allemand
était signalé la population était prévenue
par le mugissement des sirènes. A
Pérenchies, c’était par le cornet de l’usine Agache. Tant que la fin de
l’alerte n’était pas annoncée par ces moyens sonores il était interdit de
sortir des habitations en raison des chutes d’éclats d’obus.
A Pérenchies, malgré l’état de guerre, la vie avait
repris son cours. L’usine Agache maintenait son activité bien que privée d’une partie de ses ouvriers,
agents de maîtrise et cadres.
A
l’école des garçons, la mobilisation avait amputé le corps enseignant de
plusieurs de ses membres. Ceux-ci furent remplacés par un instituteur en
retraite qui reprit du service en raison de la situation, des jeunes gens
titulaires du baccalauréat ou du brevet supérieur qui à cause de la déclaration
de guerre avaient interrompu leurs études, et une jeune femme, qui ne s’était
pas destinée à l’enseignement mais qui pourtant réussit fort bien dans
l’accomplissement de sa tâche auprès des jeunes écoliers qui lui furent
confiés.
Après
la rentrée des classes le 1er octobre, le directeur de l’Ecole
Monsieur DELABIE demanda aux élèves d’apporter toute la ferraille qu’ils
pouvaient trouver. « Cette ferraille sera fondue pour faire des obus qu’on
enverra sur la tête des boches » avait ajouté cet ancien combattant et
grand blessé de la guerre de 1914. Pendant plusieurs semaines on vit des gamins
sur le chemin de l’école portant boîtes de conserves, bassines, lessiveuses
réformées, cadres et jantes de vélo, morceau de tôle… On en constitua un énorme
tas dans l’angle formé par le bâtiment principal et le mur du préau. Le tas de
ferraille fut enlevé un après-midi par un camion avant la fin du premier
trimestre et la collecte de ferraille ne fut pas reconduite.
Au cours de cette période dite « la drôle de
guerre », on n’eût pas à subir de restrictions. Les boulangeries, les
boucheries et les épiceries étaient normalement approvisionnées même si parfois
une denrée manquait dans les rayons. Le courrier était régulièrement acheminé
et distribué du moins dans les circuits civils. Il en allait différemment avec
les armées. Si les familles recevaient dans les délais normaux les lettres des
soldats, en revanche ceux-ci se plaignaient de ne pas recevoir celles de leurs
épouses. Il est vrai que les adresses des militaires dans la forme imposée, sans
doute par souci de secret et de sécurité militaires, étaient succinctes et fort
imprécises, par exemple :
Soldat
….10ème régiment d’Infanterie. Quelque part en France
Ceci ne devait pas faciliter le tri des lettres mais
entraîner dans les centres une accumulation de courrier d’où d’importants
retards dans l’acheminement. Des soldats privés de nouvelles de chez eux
adressaient dans leurs lettres de vifs reproches à leurs épouses, certains
allant presque à les accuser de les oublier. Il était fréquent d’entendre des
femmes en pleur conter cette mésaventure.
Au
tout début de la guerre, une petite unité de soldats français a été stationnée
à Pérenchies. Elle fut bientôt déplacée pour laisser place à une unité anglaise
qui resta dans notre cité jusqu’aux événements de mai 1940. Les soldats anglais
étaient répartis en différents endroits, entre autres, au patronage paroissial
et dans le bâtiment en bois de la place
ronde à l’angle des rues Carnot et Pasteur, une des dernières bâtisses
provisoires de l’époque de la reconstruction après la guerre de 1914. Quelques-uns
étaient logés chez l’habitant à l’appel des autorités en dehors de toute mesure
de réquisition.
En
rentrant de l’école, les gamins s’attardaient souvent devant les cantonnements
de ces soldats, venus d’Outre-Manche qui ne parlaient pas la même langue qu’eux.
Au contact des enfants, ils utilisaient les quelques mots de français appris
après leur arrivée en France. Des locaux occupés par les militaires anglais,
émanaient des odeurs spécifiques, celle de la cuisine et celle du tabac blond
inconnu des hommes de chez nous qui ne
fumaient que des cigarettes de « tabac gris » roulées entre leurs
doigts et lors des grandes occasions des Gauloises.
L’uniforme
des soldats anglais n’avait de commun avec celui des français que la couleur.
Il se composait d’un blouson et d’un pantalon aux multiples poches dont les bas
étaient retenus par de courtes guêtres de toile. La coupe de la capote était
plutôt élégante et se passait de ceinturon. Le bonnet à l’inverse du bonnet
français qui semblait s’imposer avec ses deux pointes, était assez discret dans
sa forme cintrée. Quant au casque on lui trouvait une similitude de forme avec
une assiette à soupe ou d’un plat à barbe. Ainsi il était aisé de distinguer
même de loin un « Tomi » d’un « Bidasse ».
L’hiver
de 1939/1940 fut un hiver rigoureux et long. Il débuta dans les premiers jours
de décembre et le dégel ne se produisit que fin février/début mars. Quelques
jours avant Noël, une abondante chute de neige fut suivie d’une courte période
de redoux. La neige en cours de fonte, surprise par le brusque retour d’un
froid vif, transforma nos rues en patinoires.
La
population a pu faire face au froid pendant ce premier hiver de guerre.
Beaucoup d’habitants avaient fait une provision de charbon qu’il était possible
d’entretenir, la vente de ce combustible se faisant encore sans restrictions.
Au cours de ces trois mois de grand froid la température ne se situa jamais
au-dessus de –15°C. On plaignait alors les soldats privés de confort dans leur
cantonnement et surtout ceux massés le long de la frontière franco-allemande,
région réputée très froide, dans les ouvrages de la ligne Maginot qu’on imaginait, n’en connaissant pas la
structure, être des glacières. On disait
aussi des soldats stationnés sur ces sites qu’ils étaient au front.
Pour
aider nos poilus à lutter contre le froid (à défaut de combattre l’ennemi) une
campagne dite du « vin chaud du soldat » fut lancée pendant le mois
de décembre, vraisemblablement par le ministère de la guerre. A Pérenchies ce
sont les écoliers qui furent sollicités par leurs maîtres pour vendre les
vignettes sur lesquelles figuraient le buste d’un soldat casqué tenant un quart
fumant, la mention « vin chaud du soldat » et le prix. En sortant de
l’école, les enfants rivalisaient de vitesse dans cette démarche de porte à
porte pour solliciter la générosité de la population civile afin de soutenir
les militaires condamnés à des conditions d’existence précaires. Beaucoup
d’écoliers « connaissaient le métier » pour avoir participé avant la
guerre aux ventes annuelles des « timbres antituberculeux ». De
retour dans leurs établissements scolaires fiers d’avoir contribué à l’effort
de guerre, ils remettaient à leurs maîtres le produit de la vente et très peu
de vignettes invendues.
Après
le choc de la mobilisation et de la déclaration de guerre, malgré le froid et
l’absence de nombreux hommes, le moral de la population était redevenu
relativement bon. On ne connaissait pas encore de restriction et la guerre, du
moins pour le moment se passait ailleurs. Face à la situation complexe, on
restait dans l’expectative. Aux dires des présidents du Conseil des Ministres
successifs de cette période, la victoire était acquise d’avance, notre armée
étant la plus forte. Se faisant l’écho de nos gouvernants la T.S.F. et la presse
ne ménageaient pas leurs efforts pour entretenir l’optimisme et la confiance de
la nation alors qu’un groupe de députés, qui, en raison du pacte
germano-soviétique, désapprouvaient l’entrée de la France en guerre contre
l’Allemagne se voyaient frappés de déchéance par la majorité de la Chambre. Sur
les ondes, aux heures de grande écoute, on entendait chanter à tue-tête :
« Nous irons pendre notre linge sur la ligne Siegfried ». Les
journaux présentaient des photographies où apparaissaient des vedettes de la
chanson se produisant devant des soldats de la ligne Maginot (certaines de ces
célébrités populaires devaient faire quelques années plus tard le déplacement
en Allemagne pour chanter devant les prisonniers) Et dans son allocution de
Noël prononcée le 24 décembre vers 23 H,
le chef du Gouvernement plein
d’enthousiasme et avec l’accent de la conviction, célébrait l’excellent moral
de nos troupes et la grande fraternité de l’armée.
Comme
partout en Europe, le premier Noël de guerre fut fêté sobrement à Pérenchies
et, pour beaucoup dans une pieuse ferveur, la pensée tournée vers les absents.
En dépit de la rigueur des consignes de défense passive et sans doute avec l’autorisation des
pouvoirs publics, le curé célébra la messe
de la nativité à minuit ce qui ne devait pas se reproduire avant la Noël
de 1944. Parmi la nombreuse assistance à cette cérémonie grandiose et
recueillie, soutenue par la Chorale paroissiale encore bien structurée malgré
la mobilisation, on remarquait quelques heureux permissionnaires en tenue
militaire.
Le
curé privé de son vicaire appelé sous les drapeaux était secondé par un prêtre
de la congrégation des lazaristes. Cet homme jovial et bon vivant, excellent
prédicateur et bon musicien avait connu Pérenchies et son curé, à l’occasion
d’une série de prédications qu’il avait faites en 1938. Il devait rester au
service de notre paroisse jusqu’au début de l’année 1941 et y revenir prêcher
lors des grands événements religieux.
La
colonie du Mont des Cats en 1942. Photo de groupe.
Parmi
l’encadrement, M. LOMMEZ, M. Alphonse DAVID, M. Jean POUPART, M. Roger HERRENG
et
d’autres…
Document
SPMC numéro 2 003
|
Les
jours s’écoulaient, l’hiver s’éloignait, les premiers signes du printemps
apparaissaient. Sur le plan des opérations de guerre rien ne se produisait. Des
pronostics et des hypothèses alimentaient les conversations dans les familles,
dans les rues, dans les cafés. Certains prévoyaient un déroulement des
opérations comme en 1914. D’autres supposaient après de longs mois d’inertie en
dépit de l’état de guerre, qu’un compromis pouvait être convenu et rétablir la
paix, l’Allemagne renonçant à se heurter à notre « infranchissable »
bien qu’inachevée, ligne Maginot.
Ce
fut la déroute de notre armée en quelques semaines, l’occupation des 3/5 puis
de la totalité de la France et cinq années de misères et de souffrances.
Dans
la nuit du 9 au 10 mai 1940, une activité aérienne inhabituelle a perturbé
le sommeil de beaucoup d’habitants,
laissant supposer qu’un élément nouveau venait changer le cours de la guerre.
Dès
le matin, les possesseurs d’un appareil de T.S.F. apprirent qu’en violation de
leur neutralité, l’armée allemande avec ses blindés et des troupes aéroportées
venait d’attaquer la Hollande, la Belgique et
le Luxembourg. La nouvelle se
répandit comme une traînée de poudre dans nos cités.
Les
victimes des bombardements subis par les grandes villes de Hollande et de
Belgique se comptaient par milliers. Une partie de la population était évacuée
vers la France. Les habitants des cités de Pérenchies situées de part et
d’autre de la voie de chemin de fer, pouvaient voir passer à raison de
plusieurs par jour, des trains composés de wagons de marchandises occupés par
des civils.
De
jour en jour, les mauvaises nouvelles confirmaient la supériorité de l’armée
allemande.
Une
certaine panique gagnait notre population. Moins d’une semaine après le début
des hostilités, on commençait à parler d’évacuation et chez beaucoup d’entre nous, on préparait
les bagages dans la perspective de cette éventualité. Aucune directive ne
venant de la Préfecture, ni des communes, il appartenait à chaque famille de
prendre sa décision. Et s’il fallait
partir, il n’y avait pas d’autre choix que la route à prendre à pieds avec le faible espoir de trouver en chemin à
partir de localités plus importantes un transport par fer. Beaucoup pensaient
gagner la région parisienne ou la Normandie en prévoyant que la progression de
l’armée allemande serait stoppée et que la guerre se déroulerait comme pendant
celle de 1914 dans le Nord et l’Est de la France. A l’opposé des indécis, d’autres étaient
déterminés à rester chez eux quoiqu’il arrivât.
Aux Etablissements Agache, l’activité avait
cessé. Les écoles n’accueillaient plus les élèves. Il fallait éviter les grands
rassemblements qui auraient été cause de nombreuses victimes en cas de
bombardement.
Le
dimanche 19 mai marqua le début de
l’exode. Il faisait un temps superbe et très calme.
Les
premiers partants se dirigèrent vers Armentières où ils firent un détour par la
gare pour le cas où un hypothétique transport ferroviaire les emmènerait vers
le sud. Au soir de ce premier jour d’exode ceux qui étaient partis dans la
matinée arrivèrent à Fleurbaix où ils firent étape. Dans les rues de ce gros
bourg, ils se reconnaissaient entre Pérenchinois. Ils faisaient aussi la
rencontre de connaissances de Prémesques et de Lompret.
Repliés
à Fleurbaix après avoir quitté Pérenchies, des soldats anglais reconnurent des
Pérenchinois et leur servirent un repas dans un local qu’ils occupaient. Ils
ouvrirent généreusement quantité de boîtes de corned-beef. Le directeur de
l’école des garçons voyant le nombre déjà important de réfugiés leur offrit
l’hospitalité de ses salles de classes. Les tables d’écoliers repoussées contre
les murs, les passants d’un soir s’allongèrent sur le sol avec leurs bagages
pour oreillers.
Malgré
la fatigue, dans cet inconfort le
sommeil se fit léger. Aussi, tôt le matin, tous reprirent la route. D’heure en
heure, le flot des fugitifs se gonflait. Bientôt ils marchaient au coude à
coude donnant le triste spectacle de l’exode. Tous avançaient péniblement, trop
couverts, par ce beau temps, mais il avait fallu endosser le maximum de vêtements
pour limiter la charge des bagages. Ceux qui semblaient souffrir le plus dans
cette marche forcée étaient évidemment les personnes âgées traînant leurs
bagages trop lourds et leurs douleurs et, les jeunes enfants dont des bébés.
Tous les moyens de transport se trouvaient réunis dans cette foule. Les uns
poussaient une bicyclette chargée de sacs placés sur le guidon, sur le cadre et
le porte-bagages ou d’un matelas roulé.
D’autres poussaient la petite charrette qu’ils utilisaient chez eux pour des
petits transports. D’autres encore transportaient une partie de leurs bagages
dans un landau. On en vit même pousser une brouette. On remarquait aussi des
gens, parfois des enfants, porter à deux une valise suspendue par la poignée à
un manche à balai. Parmi les cultivateurs beaucoup avaient aussi choisi de
fuir, abandonnant les cultures, les bovins et la basse-cour. Pour partir ils
avaient attelé leurs chevaux à la plus grande charrette de leur exploitation,
celle avec laquelle ils rentraient les récoltes, qu’ils avaient chargée de
literie, de meubles et de valises. Sous la charrette ils avaient suspendu des
cages dans lesquelles étaient enfermés des poules et des lapins. Les
possesseurs d’une voiture automobile, peu nombreux en ce temps-là, défiant le
risque de la panne de carburant devenu presque introuvable dans les rares
stations-services, transportaient plus de passagers que le véhicule pouvait
contenir. Le coffre était bourré et sur la longue galerie de ces voitures, les
bagages étaient entassés. Parfois un soldat qui avait perdu son unité ou une
personne épuisée se tenait debout sur le-marche pieds d’une de ces
voitures.
On
a appris que Lille était tombée le mercredi 29 mai.
La
fuite n’était pas la solution et ceux qui avaient essayé de s’enfuir durent
rentrer sur Pérenchies. La route du retour présentait dans les villages où
beaucoup d’habitants avaient fui, le triste spectacle du pillage. Les
ouvertures des maisons que les pillards n’avaient pas pris le soin de refermer,
laissaient apparaître le désordre que ceux-ci avaient laissé en constituant
leur butin. Il fallait bien admettre que ces actes de vandalisme n’étaient pas
le fait de l’envahisseur bien trop engagé par la conquête de notre territoire.
Pérenchies n’a pas échappé à ces actes de malveillance, beaucoup de nos
concitoyens ont trouvé leur maison ouverte et bouleversée à leur retour.
Malgré
la chute de quelques projectiles, notre ville n’avait pas subi beaucoup de
dégâts
Par
contre, quatre personnes civiles ont trouvé la mort. Un commerçant ambulant,
d’articles de textile a été victime d’une bavure. S’étant proposé d’emmener
dans son véhicule une jeune femme vers une maternité, il a reçu en arrivant à
Lille une balle dans la poitrine pour n’avoir pas entendu ou pas compris
l’ordre de s’arrêter que lui intimait un soldat. Sur la route de l’exode, pas
très loin de Laventie, à proximité d’un estaminet situé en rase campagne qui a
pour nom « la bombe » depuis la guerre de 1914, un jeune couple et
leur petite fille ont été tués au cours d’un bombardement. On a déploré aussi
la mort d’un soldat.
Petit
à petit la vie a repris à Pérenchies. En attendant que les Ets Agache et autres
entreprises reprennent une activité, les hommes faisaient leur jardin,
quelques-uns s’embauchaient dans les fermes pour des travaux saisonniers. Les
écoles ont rouvert leurs portes. Les journaux ne paraissant plus, c’est donc
par la T.S.F. et la transmission orale que se propageaient les nouvelles. On
apprit bientôt le retrait du gouvernement à Tours puis à Bordeaux et la prise
de Paris par l’armée allemande. Pour les Français vivant au nord de la Somme,
le temps de l’exode était passé mais en ce mois de juin, il entraînait nos
concitoyens des régions situées plus au sud et en particulier ceux de la région
parisienne. C’est par plusieurs millions qu’ils errèrent sur les routes
subissant à leur tour la faim, la fatigue, le mitraillage et les bombardements,
poursuivis par l’envahisseur qui se déployait en éventail vers le sud du pays.
Puis,
on annonça que le Maréchal PETAIN, devenu Président du Conseil des Ministres,
avait demandé un armistice.
A
Pérenchies comme partout en France, la fin des hostilités fut accueillie malgré
l’humiliation de la défaite et de l’occupation avec soulagement. Puisque la
guerre paraissait terminée on attendait le retour des soldats. On n’imaginait
pas encore qu’ils ne seraient démobilisés qu’après cinq années de captivité en
Allemagne.
Ce
ne fut que vers la fin juillet que le bruit se répandit qu’un général français,
un certain De Gaulle, inconnu de tous, avait gagné Londres dans le but de
poursuivre la guerre aux côtés des Anglais.
Et
bientôt, on put l’entendre à travers un insupportable brouillage s’adresser aux
Français sur les ondes de la BBC, souvent présenté par un éditorialiste de
grand talent, le capitaine (de réserve), Maurice SCHUMANN.
Charles
De Gaulle et Maurice SCHUMANN.
Document
« Association : A la Recherche du Passé d’Halluin ».
(photo
DD 12 574 n°IMG 681)
|
Article
de presse de la Voix du Nord du 21 février 1989.
Maurice
SCHUMANN est décoré de la médaille d’honneur de la ville par Roger DUTRIEZ, le
Maire.
Document
SPMC numéro 3 190
|
Après
la chute de Lille, les Allemands ont réquisitionné la salle des fêtes de
Pérenchies pour y regrouper une partie des soldats français capturés lors de la
reddition de la garnison. Ces hommes étaient maghrébins et sénégalais. Ils sont
restés plusieurs semaines dans ce cantonnement, puis un jour on les a vus
gagner avec leur barda escortés par des soldats allemands, la gare d’où, dans
des wagons de marchandises, ils sont partis pour l’Allemagne.
Aux
premiers temps de l’occupation une petite unité de soldats allemands, une
compagnie, d’environ 80 hommes a été stationnée à Pérenchies. Avec un ordre de
réquisition, ils ont été logés chez l’habitant, chez des vieux couples et des
personnes seules disposant d’une chambre inoccupée. Ces soldats se rendaient
chaque jour au terrain de football pour pratiquer des exercices sportifs et de
combat. En marchant dans un ordre impeccable, ils chantaient souvent les deux
ou trois mêmes chansons de leur folklore parfaitement harmonisées à deux voix.
Ces chansons bien qu’anodines restent liées dans la mémoire des français aux
mauvais souvenirs de l’occupation.
Guerre
1939/1945. Des soldats allemands stationnent à Pérenchies et vivent à Lompret.
Ici,
une troupe passe devant l’entrée du cimetière de Pérenchies.
Document
SPMC numéro 5 557
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Le
séjour de ces soldats à Pérenchies ne fut que de quelques mois. Tant qu’a duré
l’occupation, il n’y eut pas d’autres unités stationnées dans notre ville. Mais
en 1944, pendant quelques mois avant la libération, les Allemands
réquisitionneront des bâtiments de l’usine Agache pour stocker des produits
alimentaires qu’ils détruisirent pendant leur retraite.
Guerre
1939/1945. Des soldats allemands stationnent à Pérenchies et vivent à Lompret.
Document
SPMC numéro 5 556
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Durant
le mois de juin 1940, Pérenchies n’a pas souffert du manque de ravitaillement.
Les boulangeries maintenaient leurs ventes, l’approvisionnement en farine étant
suffisant et, pourvues de combustible elles étaient en mesure d’assurer la
cuisson du pain. Un certain rétablissement des circuits de distribution a
permis aux magasins d’alimentation d’être relativement bien approvisionnés pour
répondre aux modestes besoins de la population de ce temps-là. Mais à partir de
juillet cartes et tickets d’alimentation ont été distribués en mettant en
application de rigoureuses restrictions. Aucune denrée, aucun article de
nécessité courante n’a échappé à un très maigre rationnement. Cette rigueur
sans connaître le moindre assouplissement s’étendit jusqu’aux années
d’après-guerre.
Si
au cours de quatre années d’occupation on n’a pas croisé beaucoup de soldats allemands
à Pérenchies, il suffisait de se rendre à Lille pour remarquer l’omniprésence
de l’occupant. Il était partout dans les rues, dans les tramways, dans les
cafés. On ne comptait plus les bâtiments réquisitionnés, frappés du drapeau à
croix gammée. Mais sans le voir on ressentait en permanence le poids de
l’occupation et le traumatisme moral qu’il exerçait en chacun de nous. Il
disposait de tous nos équipements, industriels, ferroviaires, routiers etc
… Il fléchait nos routes pour les
besoins de ses déplacements en plaçant des panneaux de bois peints en jaune aux
carrefours. Il prélevait une grande partie de nos récoltes nous réduisant à la
sous-alimentation et à la malnutrition. Sur nos murs, il apposait ses affiches
avec ses consignes et ses menaces à la suite du moindre incident. Il disposait
de la presse écrite et en contrôlait les publications. Il s’est emparé des stations de radio pour étendre sa
propagande avec l’aide de français corrompus, collaborateurs zélés.
Même
en ne regroupant qu’une minorité, la corruption s’est propagée sous différentes
formes dans la population française. Pérenchies n’en a pas été complètement
exempte. Elle a eu aussi ses trafiquants du marché noir et a compté quelques
délateurs et collaborateurs ».
A suivre…..
Philippe JOURDAN
26 avril 2020
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Philippe JOURDAN
Si Pérenchies m’était contée…
67, rue Jean MOULIN
59840 PERENCHIES
|
Correction
et édition : Jean-Pierre COMPERE, administrateur du Blog
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