Le monument aux morts de la Grand’Place en novembre 2020. Photo Christiane LEGRAND. Vers 2020. |
Dimanche 25 avril 2021, a été
commémoré, dans toute la France, le souvenir de la déportation et ce 8 mai
2021, on a célébré la fin de la seconde guerre mondiale.
La pandémie que nous connaissons
ne permet pas, pour la seconde année, de participer à ce devoir de mémoire
comme nous le voudrions.
Voici la suite de ces quelques
éléments de cette histoire locale et nationale que nous ne devons pas oublier.
Ces divers documents ont été commentés lors de nos réunions d’histoire locale
en visioconférence en avril 2021.
Libération de Pérenchies en septembre 1944. Quelques femmes rassemblées sur la Grand’Place célèbrent l’événement. Document SPMC numéro 2 531 Ter. |
Philippe JOURDAN
Président de l’association
d’histoire locale « Si Pérenchies m’était contée… »
5 mai 2021.
LA FAMILLE CAYZEELE ET LA RESISTANCE
Daniel CAYZEELE a fait parvenir à
notre association plusieurs feuillets rédigés par son père, Henri CAYZEELE, né
le 29 juin 1927 à Houplines, marié à Pérenchies en 1946 et par son grand-père,
Arthur CAYZEELE, né le 15 avril 1900 à Houplines.
Durant la guerre, Arthur et Henri
vivaient à Pérenchies. Tous les deux, ils participèrent à des actes de
résistance.
Arthur CAYZEELE fleuri. Document non daté. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
1er feuillet écrit par Henri. Extraits.
Henri CAYZEELE. Service national en 1947. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
« Je puis affirmer que mon
père Arthur Cayzeele fut, pendant toute l’occupation, membre des Forces Françaises de l’Intérieur. Je fus
témoin bien souvent, pour l’avoir aidé, d’actes de propagandes contre l’ennemi par
mon père (collage d’affiches, distribution de tracts, nettoyage d’armes, …). Je
me rappelle surtout de nombreuses perquisitions faites chez nous par la police
allemande… Un matin, étant seul chez moi, je gardais mes frères et mes sœurs,
deux inspecteurs allemands se présentèrent pour perquisitionner. Etant donnée
l’absence de mes parents et mon refus de les laisser entrer, ils allèrent
quêter deux témoins dont le garde-champêtre dans l’avenue du Kemmel. Après
avoir mis toute la maison et la cour, sens dessus-dessous, ils s’en
retournèrent bredouilles. Je m’empressais alors de courir à la rencontre des
parents qui arrivaient. .. »
Henri CAYZEELE et Yvonne VERSLYPE le 18 août 1959. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
Autres feuillet écrits par Arthur. Extraits.
Arthur CAYZEELE. Photo d’identité non datée. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
«C’est en fin du mois de juillet
1940 que le camarade Louis CHIEUS, d’Ennetières en Weppes, est venu me
solliciter pour organiser des groupes de résistance à Pérenchies. Je réussis à
avoir 7 groupes de trois hommes, 1 de quatre, et le mien que je formais avec
Achille TAMPERE que j’avais choisi comme homme de confiance. Nous étions donc
27 hommes et femmes. Nous distribuions et affichions des tracts patriotiques
qui étaient édités par « France d’abord ». Nous ne savions pas où se
trouvait l’imprimerie clandestine. Les tracs étaient en français et en
allemand.
Puis, Louis m’a donné l’ordre de
saboter les lignes téléphoniques. Avec prudence, nous coupions des fils vers
Pérenchies, Prémesques, Lompret, le Fort d’Englos, Lambersart et nous sabotions
des camions militaires en plaçant des clous en-dessous des véhicules
stationnés. Nous avions récupéré des fusils, des révolvers, des balles, de la
poudre que les soldats anglais et français avaient abandonnés lors de la
débâcle et les avions camouflés un peu partout, moi rue de la Pannerie, chez Jules DEGRAEVE, dans un vieux puit
abandonné près de la briqueterie, chez la vieille Madame BEAUPREZ, face à la ligne de chemin de fer au pont
Ballot, chez Edouard LOGIER au Fresnel, chez la veuve DEPOORTER à Prémesques,
chez Henri SAMSON, rue Kemmel, et à la Buvette POLET, rue de la Prévôté.
Avenue du Kemmel entre les deux guerres. Document SPMC numéro 1 203. |
On a reçu l’ordre de tout donner
aux francs-tireurs. Jules HOLLEVOET les transmettait à d’autres groupes sur
Lomme ou Tourcoing. J’ai passé 4 fusils, des révolvers et des balles à Jean
DESREUMAUX de Prémesques et à Fernand WATERBLEZ de la rue Kuhlmann et d’autres
à Jean DECROCK de la rue de la Prévôté. D’autres venaient chez moi avec un
petit sous cassé en deux comme signe de reconnaissance.
J’étais en liaison avec Louis et
Henri CHIEUS d’Ennetières, Louis PATTINIER de Lomme, Jules DEGRAEVE de
Lambersart, André PIERRARD de Bailleul, VANSTEENKISTE de Nieppe, Jules WOLLEVOET de Lomme, de Simon
de Verlinghem, de Jean DESRUMEAUX, de Roger LECERF de Prémesques, de Fernand
WATTERBLEZ, d’Edouard LOGIER du Fresnel, d’Achille TAMPERE, Grégoire VERSTRAETE
de Pérenchies ainsi que sa femme Blanche, Maurice VERBECKE.
On faisait des réunions chez moi
jusqu’au jour où je fus continuellement perquisitionné.
Le 18 septembre 1941, la police
est venue me chercher pour passer à l’anthropométrie à la mairie de Pérenchies
tellement j’étais connu. On a alors distribué les tracts en 1943 du côté de
Laventie, de la Gorgue et d’Estaires. On les collait sur les poteaux
télégraphiques pour démoraliser les soldats allemands.
J’ai aussi distribué des cartes
de ravitaillement de pain et de denrées diverses aux réfractaires ainsi qu’à
des parents de déportés. On les passait sous les portes dans des enveloppes
pour ne pas être reconnus.
Au début de 1942, j’ai pris trois
chevaux blessés par des éclats de bombes et les ai fait abattre pour donner de
la viande à la population de Pérenchies qui pourra en témoigner.
Lorsqu’on portait des messages,
nous avions un code. On se frottait la jambe droite, parfois la gauche pour se
faire reconnaître. Je me faisais accompagner d’une femme afin de paraître moins
suspect. Parfois, c’était Blanche Verstraete de la rue Philippe de Girard,
parfois Jeanne Tampère de la rue Leplay et, parfois, ma femme.
Un jour, je vis beaucoup de
soldats allemands entrer au Fort d’Englos et j’ai donc prévenu Fernand WATTERBLEZ
qui faisait partie des francs-tireurs. Il a ainsi prévenu son groupe et m’a
félicité de l’avoir prévenu.
En mars1941, je revenais de la
Mitterie où j’étais allé chercher du matériel avec ma femme et Madame DEPOORTER
qui poussait une voiture d’enfant chargée à bloc. En entrant dans la rue de la
Pannerie, ma rue, mon garçon âgé de 13 ans qui était resté soigner les plus
petits à la maison, nous voyant revenir de loin accourut pour nous prévenir que
la sureté perquisitionnait la maison. Mme DEPOORTER a eu la présence d’esprit
de faire demi-tour immédiatement et est retournée chez elle à Prémesques à la
Collerie pour camoufler le matériel. Je pris une autre direction tandis que ma
femme continuait seule pour rentrer à la maison. Je suis parti chez Mme BEAUPREZ
au Pont Ballot pour me cacher. Je la remercie.
La rue de la Pannerie entre les deux guerres. Document SPMC numéro 1 185 |
Le premier jour quand les
Allemands sont entrés dans Pérenchies, j’ai été réquisitionné par les officiers
alors que je passais rue de Lille pour aller ramasser les soldats
Nord-Africains morts à seule fin de les conduire au cimetière de Pérenchies.
J’ai conduit les blessés à l’hospice de Pérenchies où on avait installé une
infirmerie de fortune puisqu’il n’y avait plus de docteur à Pérenchies. J’ai
réussi à prendre le révolver dans la gaine d’un lieutenant français qui avait
été tué au volant de sa voiture.
Au même moment, une femme
étrangère à la ville devait accoucher. J’ai appelé mon ami DELMOTTE qui était
épicier rue Carnot pour conduire cette femme à Lille à la maternité. L’officier
allemand accepta que Madame Julia DELBECKE les accompagne. Malheureusement,
quand la voiture arriva au pavé de Pérenchies, face à la briqueterie de
Lambersart, ils furent mitraillés par des soldats nord-africains couchés en
position de tir de chaque côté de la route. Mon camarade DELMOTTE fut tué sur
le coup. S’apercevant que la voiture était occupée par des civils, leur chef
fit cesser le feu. La femme arriva juste à temps pour accoucher.
En 1944, on a chassé les
Allemands du territoire de Pérenchies. Nous avons attaqué la mairie pendant que
les Allemands nous mitraillaient en se sauvant.
Libération de Pérenchies en septembre 1944. Présence à droite d’un FFI : Michel DEBRUYNE. Document SPMC numéro 5 602 |
Nous avons occupé la mairie puis
nous nous sommes ré »unis entre tous les résistants de la commune et nous avons formé un comité de Libération
de 23 membres. Nous avons désigné un maire et des adjoints et comme membre de
la résistance FTPF, je fus nommé conseiller municipal.
Un peu plus tard, j’ai été
convoqué au bureau militaire de Lille, place du théâtre, puisque j’étais engagé
volontaire comme soldat de la 5ème compagnie, 3ème
bataillon du groupe Fontaine numéro matricule 6 072. J’ai été autorisé à
porter l’insigne FFI numéro 212,738. J’ai touché plusieurs fois une prime de
combattant de la résistance.
J’avais fait, peu après, ma
demande pour avoir la carte de combattant mais, malheureusement, j’ai négligé
de répondre au questionnaire que j’avais reçu de la Préfecture. La gendarmerie
militaire est venue plusieurs fois chez moi pour m’engager à compléter mon
dossier. Je ne m’en suis jamais occupé et mon dossier est toujours à la
Préfecture avec mes photos et je regrette de ne pas avoir continué.
Arthur CAYZEELE et deux de ses fils : Henri et Jean. Années 50/60. Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
Il est à noter que mon fils Rémy
a été pris pour moi à l’âge de 18 ans par la gestapo. Il a été envoyé à la
prison de Loos pour 3 mois puis envoyé ensuite au camp de Ravensbruck en
Allemagne jusqu’à la fin de la guerre. Il fut libéré par l’armée russe après 18
mois de camp de concentration. Il fut victime de la résistance. Il faisait
partie d’un de mes groupes de trois, en triangles. Je pense que si c’était moi
qui avais été pris, je ne serai certainement plus revenu. On m’aurait peut-être
fait mourir là-bas en Allemagne comme beaucoup de mes camarades.
J’ai aussi autorisé mon fils Jean
à s’engager au début 44, à l’âge de 15 ans. Il est allé au 3ème
génie de sapeurs, 17ème compagnie et il a aussi sa carte de FFI,
ayant chassé l’ennemi de notre pays. J’ai fait et aider à beaucoup de choses
pour saboter la machine de guerre allemande à seul fin de les chasser de notre
pays. Il est assez difficile de se rappeler de tout ce que l’on a fait. On peut
toujours prendre des renseignements sur mon compte dans Pérenchies concernant
mon activité sur la résistance.
Fait à Pérenchies le 15 février
1946.»
RECHERCHE D’ARCHIVES
Arthur CAYZEELE et 4 de ses fils. Années 50/60 ? Photo de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
En 1933, la famille Cayzeele habite rue de la Pannerie.
La famille est arrivée à Pérenchies le 5 avril 1933 venant de
Prémesques.
Arthur était né le 15 avril 1900 à Houplines. Il était ouvrier d'usine.
Il avait épousé à Armentières Raymonde Comyn le 7 août 1920. Elle était née à
Pérenchies le 30 novembre 1902. Elle était ménagère.
La famille d’Arthur CAYZEELE. Photo non datée de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
Plusieurs autres personnes sont dans le foyer :
Rémy, né le 30 01 1923 à Houplines,
Agnès, née le 05 09 1924 à Armentières,
Henri, né le 29 06 1927 à Houplines, marié à Pérenchies le 30 11 1946,
Jean, né le 26 02 1929 à Prémesques,
Christiane, née le 10 01 1932 à Prémesques,
Renée, née le 24 08 1933 à Pérenchies,
Marceau, né le 19 09 1933 à Pérenchies,
Gilbert, né le 04 09 1938 à Pérenchies,
Georges, né le 12 02 1941 à Pérenchies,
Claude, né le 18 06 1942 à Pérenchies et DCD le 18 09 1942.
Andrée, née le 11 05 1944 (? date un peu difficile à lire) à
Pérenchies.
Arthur CAYZEELE et 6 de ses fils : Jean, Georges, Rémy, Marceau, Henri et Gilbert. Photo non datée de la famille Cayzeele remise à SPMC pour copie. |
LA SECTION DES
PRISONNIERS DE GUERRE
Après la guerre 1939/1945, une section d’anciens prisonniers
sera constituée à Pérenchies. Elle rassemblera entre 100 et 200 personnes.
Un drapeau sera confectionné. Il est aujourd’hui en dépôt
dans notre association.
Remise du drapeau à la section pérenchinoise des anciens prisonniers de la guerre 1939/1945, devant le monument aux Morts de la Grand’Place. Document SPMC numéro 2 775. |
Les anciens prisonniers de guerre devant la mairie. Après la guerre. Document SPMC numéro 5 874. |
Le drapeau des associations des prisonniers de guerre, section de Pérenchies 1940/1945. Objet SPMC numéro 1060 |
Quelques membres de la section des anciens prisonniers de guerre, avec le maire Roger Dutriez, lors du 8 mai 1995. Salle de l’Europe. Document SPMC numéro 6 018 |
Défilé pour le 8 mai 1945, rue de la Prévôté, devant la buvette de M. POLET. Document SPMC numéro 256. |
Défilé rue de Lille (actuelle rue du Général Leclerc) le 8 mai 1945 devant la maison du Docteur NUYTS. Document SPMC numéro 6 119. |
Cérémonie du 8 mai 1995. Stèle des anciens combattants. Document SPMC numéro 6 017. |
Cérémonie d’hommage pour la Déportation. Avril 2019. Une partie de la section UNC de Pérenchies. Photo Christiane LEGRAND. |
Philippe JOURDAN
Président de SPMC.
Avril 2021.
Logo 8 mai 1945. |
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JOURDAN. Si Pérenchies m’était contée… 67, rue Jean
MOULIN. 59840 PERENCHIES |
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