Le monument aux morts de la Grand'Place en novembre 2020. Photo ville de Pérenchies. |
Dimanche 25 avril 2021, a été
commémoré, dans toute la France, le souvenir de la déportation et ce 8 mai
2021, on va célébrer la fin de la seconde guerre mondiale.
La pandémie que nous connaissons
ne permet pas, pour la seconde année, de participer à ce devoir de mémoire comme
nous le voudrions.
Voici quelques éléments de cette
histoire locale et nationale que nous ne devons pas oublier. Ces divers
documents ont été commentés lors de nos réunions d’histoire locale en
visioconférence en avril 2021.
Pavoisement rue Kuhlmann à l’occasion de la fête de la Libération en 1945. Document SPMC numéro 2 501. |
Philippe JOURDAN
Président de l’association
d’histoire locale « Si Pérenchies m’était contée… »
5 mai 2021.
LE BOMBARDEMENT DE
LOMME DELIVRANCE EN AVRIL 1944
La Voix du Nord a évoqué, il y a 77 ans, dans la nuit du 9 au 10 avril
1944, le bombardement de la gare de triage de Lille-Délivrance un peu après
minuit et en deux vagues par 228 avions anglo-américains qui ont déversé plus
de 2 200 bombes détruisant les alentours et les villes voisines.
A Lomme, il y eut 4 000 maisons détruites, plus de 600 morts et
des milliers de blessés.
A Pérenchies, il y eut des
conséquences.
Document 1
Enquête après la guerre 1939/1945, rédigée par le maire de Pérenchies
en 1950.
Marie-Claude VERVISCH l’a retrouvée aux archives du Nord sous la cote 3
T 1816
- Le territoire de votre commune a-t-il été bombardé, par les alliés de
1940 à 1945 ? Oui.
A quelles dates ?
1er : le 11 avril 1944
(NDLR : selon les sources,
le bombardement a eu lieu dans la nuit du 9 au 10 avril 1944 vers minuit).
Le 2ème : le 26 août 1944.
Quel objectif visaient-ils ?
1er : gare de Lomme-Délivrance.
2ème : train en gare de
Pérenchies
Cet objectif a-t-il été atteint ?
1er : oui.
2ème : non.
Des dégâts ont-ils été commis par les bombardements alliés ? Oui.
Y a-t-il eu des maisons détruites ? 6.
Y a-t-il eu des victimes ? 6.
Document 2
La carte de la situation géographique du bombardement.
Document 3
L’évocation dans
notre Blog du 31 juillet 2019 de l’événement et des conséquences par Pierre
Haigneré, réfugié à Pérenchies en avril 1944.
« Le 10 avril 1944, un déluge de bombes
s’abattait sur la cité de Lille Délivrance et sur la gare de triage faisant un
grand nombre de victimes et provoquant d’immenses destructions dans la gare
mais surtout sur les maisons des cheminots dont plus de la moitié était
dévastée et rendue inhabitable.
Ma
famille vécut cet enfer, blottie sous l’escalier, et sortit quasiment indemne
pour rejoindre les autres habitants qui, hébétés, contemplaient la désolation
du quartier et essayaient avec des moyens dérisoires de sauver les personnes
enfouies sous les décombres.
Pendant
deux à trois jours, nous errâmes dans des abris provisoires mis à disposition
par des voisins compatissants mais il fallut rechercher un logement plus
pérenne et nous prîmes la route avec une carriole tirée par un âne emmenant le
peu de mobilier pas trop endommagé pour nous réfugier chez une vieille dame
propriétaire d’une ancienne forge au hameau du Fresnel entre Pérenchies et
Houplines composé de quelques fermes et de maraîchers.
Pierre Haigneré à l’âge de 7 ans, un an avant les faits racontés. Document SPMC. |
Ce
fut une vraie surprise pour mes parents, mes deux frères et moi-même. Agé de 8
ans, je découvrais un monde rural jusqu’alors inconnu qui ouvrait des espaces
immenses consacrés à l’agriculture et au maraîchage d’où étaient absents les
commerces traditionnels mais surtout l’école, le stade et la piscine que je
fréquentais assidûment dans mon quartier cheminot aujourd’hui anéanti.
Nous
étions devenus des « sinistrés » ou selon le cas, des
« réfugiés ». Une nouvelle vie commençait avec de nombreuses
contraintes….
Lomme
le 13 novembre 2018. »
Document 4
Ma
vie à Pérenchies pendant la guerre 39/45 par Madame
MARSELOO.
« On avait aussi hébergé pendant plusieurs mois un couple de
rescapés du bombardement de Lille Délivrance. Cette nuit-là, on s’est tous
réveillé et on s’est caché dans une petite pièce dans le noir jusqu’au matin.
Une bombe est tombée au Grand But et d’autres vers Verlinghem. On a eu très
peur. Il y avait souvent des alertes mais jamais si près ».
Mme Marseloo et sa fille et le café de la Place Document SPMC numéro 252 |
Document 5
Le
10 avril 1944, le bombardement de Lille-Délivrance par François
BAILLET (juillet 2004)
« La nuit est printanière. A la recette des
PTT à Pérenchies, tout le monde dort. Je suis réveillé par le ronronnement
d’un moteur d‘avion. Ma chambre qui est au premier étage s’ouvre par deux
fenêtres dont l’une donne rue de Lille et l’autre rue de la poste face au café
tenu par Madame Denise SAPIN. Il n’y a ni volets ni persiennes mais seulement
des doubles rideaux roses suffisamment épais pour ne pas laisser passer la lumière
électrique filtrer à l’extérieur et installés par ma mère. L’avion s’est
éloigné. Je n’entends plus le bruit du moteur.
Soudain, ma chambre est inondée d’une lueur
rougeâtre et murs et plafond s’embrasent. Je me lève, soulève les
double-rideaux. Dans le ciel, des fusées éclairantes. On voit comme en plein
jour. On perçoit le bruit vrombissant d’une première vague de bombardiers. Je
dégringole les escaliers qui conduisent à la cave.
Nous allons être bombardés, dit mon père. Cette
cave, j’en avais une peur bleue. Elle avait été bien étayée certes, mais mon
père avait décliné poliment l’offre de son voisin, le docteur Nuyts, de la
faire communiquer avec la sienne prétextant qu’en sa qualité de gérant des
fonds publics, percer le mur n’aurait pas été prudent. Pas d’échappatoire
possible donc si la maison venait à s’effondrer. Enterrés vivants ! A
cette seule idée, mon sang se glace dans mes doigts, ma bouche, mes
lèvres se dessèchent et, toujours ces vrombissements, ce sol qui tremble au fur
et à mesure que les bombes, par chapelets entiers, la défoncent. Bref, pendant
plus d’une heure, les escadrilles se succèdent, vague après vague. Que
visent-elles ? Nous n’en savons rien. Nous l’apprendrons au lever du
jour : la gare de triage de Lille-Délivrance.
Les bombes atteignent Lomme d’abord, la campagne
puis Pérenchies. La dernière est tombée au pied d’un arbre situé à l’entrée du
pré qui jouxte la propriété de Monsieur Louis Ducroquet, qui fait fonction de
maire, 1 rue de Lomme. L’arbre est déraciné. La clôture ornementale qui
limitait le terrain est gravement endommagée ainsi que le garage. Une poutre
maîtresse de la toiture est sectionnée. Les éclats ont brisés les
vitres ».
Charles LEMAHIEU,
mort dans un camp d’internement en 1945.
Document 1. Une image
mortuaire.
Sur le site de vente par correspondance DELCAMPE, une image mortuaire
a été mise en vente. Elle évoque le décès de Charles LEMAHIEU, né à Pérenchies
le 17 septembre 1924. Il vivait en Belgique..
Image mortuaire de Charles LEMAHIEU (1924-1945) Site DELCAMPE. |
Il était le fils de Georges
LEMAHIEU et d’Antoinette DECLERCQ.
Il fut arrêté par la SS allemande
le 20 juin 1943 et exilé en Allemagne le 20 janvier 1944.
Il est mort pour la patrie le 17 mars 1945 dans le camp de Siegburg.
Document 2. Les
recensements.
1906
LEMAHIEU Charles, né en 1864 à
Prémesques. Menuisier chez Agache. 26, rue de la Prévôté.
NOE Juliette, son épouse, née en
1865 à Pérenchies. Sans profession.
LEMAHIEU Louis, né en 1886 à
Pérenchies. Leur fils. Mécanicien chez Agache.
LEMAHIEU Henri, né en 1886 à
Pérenchies. Leur fils. Menuisier chez Agache.
LEMAHIEU Julia, née en 1888 à
Pérenchies. Leur fille. Bobineuse chez Agache.
LEMAHIEU Adrienne, née en 1896 à
Pérenchies. Sans profession.
LEMAHIEU Georges, leur fils, né
en 1901 à Pérenchies. Sans profession.
1911
LEMAHIEU Adrienne est épeleuse
chez Agache.
1921
LEMAHIEU Charles est contremaître
chez Agache.
65, rue Gambetta.
LEMAHIEU Georges-Paul, leur fils,
né en 1901 à Pérenchies est mécanicien chez Despatures.
1926
LEMAHIEU Georges est ajusteur
chez Agache.
7 avenue du Kemmel.
Sa femme, Antoinette DECLERCQ,
née en 1898 à Ploegsteert (B). Epicière par la suite.
LEMAHIEU Charles. Né à Pérenchies
en 1924.
Document 3. Recherches sur INTERNET.
SIEGBURG
Siegburg est une ville allemande
entre BONN et OVERATH.
On y trouvait une prison où on
rassemblait, entre autres, en attendant leur départ pour les camps de
concentration, les prisonniers NN.
LES PRISONNIERS NN, « Nuit et Brouillard ».
C’est le nom de code afin de
désigner ceux qui ont commis des infractions contre le Reich ou les forces
d’occupation dans les territoires occupés.
Le travail. Dessin d’Henri GAYOT publié dans le site BLOG ADIRP 37-41 avec l’autorisation de son fils André. Janvier 2019. INTERNET. |
Document du Ministère de la
défense. Collection « Mémoire et Citoyenneté » numéro 36. Recherches
sur Internet.
« Lancée le 10 mai 1940, l’offensive du
IIIe Reich en Europe occidentale impose à la Belgique, la Hollande, le Luxembourg,
la Norvège et la France de vivre sous le joug de l’occupant. La résistance à
l’envahisseur nazi s’organise dès les premiers mois.
Dans un premier temps, les
sanctions contre ces actions de résistance sont fortes.
Leurs auteurs font l’objet de poursuites
et sont condamnés soit à mort, soit à de lourdes peines de prison purgées en
Allemagne.
Toutefois, ces poursuites n’ont
pas le résultat escompté : les condamnés à mort deviennent des martyrs, tandis
que procès, peines de prison et peines capitales contribuent à renforcer les
cohésions nationales et la volonté de résistance.
Hitler envisage alors d’adopter
d’autres mesures à l’encontre de ces résistants occidentaux.
On publie des décrets appelés NN
(Nacht und Nebel).
Ces textes instaurent un statut
spécial pour tous les opposants qui représentent un danger pour la sécurité de
l’armée allemande et constituent des ennemis du Reich : saboteurs, communistes,
opposants politiques, responsables de réseaux, agents parachutés…
"Le décret NN doit être appliqué
aux cas : d'attentats à la vie et coups portés aux personnes ; d'espionnage ;
de sabotage ; de menées communistes ; de fomentation de troubles ; d’avantages
procurés à l'ennemi par aide portée au passage des frontières ; de tentative de
gagner les forces armées ennemies ; d'aide portée aux membres des forces armées
ennemies ; enfin en cas de détention illégale d'armes."
"Les audiences des tribunaux
en Allemagne, compte tenu des "menaces à la sécurité nationale",
doivent se dérouler à huis clos et dans le secret le plus absolu."
Ainsi, lorsque la police
allemande arrête une personne soupçonnée d’entretenir des contacts "avec
l’ennemi" dans l’un des cinq pays mentionnés, l’inculpé est traduit en
justice dans son propre pays aux conditions que l’action judiciaire puisse être
menée à son terme dans un délai de 8 jours et qu’une condamnation à mort soit
prononcée.
Si ces conditions ne peuvent être remplies, l’intéressé est secrètement déporté en Allemagne pour y être soit interné en attendant de faire l’objet de poursuites judiciaires, soit emprisonné dans un camp de concentration sous le sigle NN où il est condamné à mourir d’épuisement par le travail et les mauvais traitements.
Un débat anime les historiens sur
l’origine des termes « Nacht und Nebel ».
Sur le document en 1941, on
remarque deux initiales « NN » qui peuvent désigner plusieurs choses
: Non Nemo (personne) ou encore Norge und Nederland (Norvège et Hollande) où la
loi est d’abord appliquée pour être ensuite étendue aux 3 autres pays.
Certains historiens penchent davantage sur « L’Or du Rhin », l’opéra de Richard Wagner, qui jouit de l’admiration d’Hitler. Un personnage lance une malédiction à l’autre en s’écriant « Nacht und Nebel gleich ! » c’est-à-dire « Nuit et brouillard tout de suite !". Aussitôt, la forme humaine du personnage maudit disparaît dans une colonne de fumée.
Cette justification
"mythologique" serait l'allégorie des conditions particulièrement
épouvantables que subissent les prisonniers NN dans les lieux d'internement et de
déportation. Il faut intimider. Face aux actes de résistance et d’opposition,
un simple emprisonnement, même s’il s’agit de la réclusion à vie, est
interprété comme "un signe de faiblesse". Hitler exige la peine de
mort ou "une mesure laissant la famille et la population dans
l’incertitude quant au destin du coupable".
Dès leur arrivée au camp, les
prisonniers NN sont distingués des autres prisonniers ; les lettres NN, aux
couleurs vives, rouge ou jaune selon les catégories, sont peintes sur leurs
vêtements, les exposant particulièrement aux sévices des gardiens SS ou des
prisonniers de droit commun désignés comme surveillants des déportés.
Les témoignages concordent sur le
sort particulier réservé aux prisonniers NN, la mort, rarement évitable, par
différents moyens : la faim, le froid ou la chaleur torride, la maladie,
l’épuisement. D’une façon générale, tout était savamment pesé, calculé, pour
abêtir, avilir et faire disparaître des hommes dont la seule faute était
d’aimer et de défendre leur patrie contre l’occupant nazi. Ils sont soumis à un
régime pénitentiaire particulièrement féroce : les rations alimentaires sont
moindres que celles des autres détenus ; ils sont pendant très longtemps
interdits de soins infirmiers ; les sévices sont permanents : coups gratuits,
humiliations, jeux sadiques, exécutions sommaires ; ils subissent les stations
debout interminables sur les places d’appel ; aucune communication n’est
permise avec leurs codétenus. De plus, ils sont employés à des travaux
exténuants de terrassement, des travaux totalement inutiles, mais harassants.
Ces résistants meurent sans
gloire ni sépulture, au nom d’une dignité niée ».
AVRIL 2021. MORT
DE M. HUBERT FAURE DU COMMANDO FRANÇAIS KIEFFER.
Dans la nuit du 16 au 17 avril
2021, est décédé l’avant-dernier membre vivant du commando Kieffer, le seul
bataillon français ayant participé au débarquement sur les côtes normandes le 6
juin 1944.
Hubert FAURE et 176 camarades
avaient participé à cet épisode important de notre histoire nationale.
Il est mort à l’âge de 106 ans.
Le dernier survivant, Léon
GAUTIER, est aujourd’hui âgé de 98 ans.
Hubert FAURE, membre du commando KIEFFER vers 1944. Document INTERNET. |
Hubert FAURE, membre du commando KIEFFER lors de l'inauguration de sa rue dans sa ville natale de Neuvic Document INTERNET |
LE RESEAU VOIX DU NORD COMMEMORE SES 80 ANS
En avril 1941, il y a 80 ans, était publié le premier numéro de La Voix du Nord, un journal clandestin rédigé par Jules NONTOUR et Natalis DUMEZ. 65 exemplaires seront imprimés pour être distribués. La date présumée serait le 1er avril 1941 mais celle-ci ne figure pas sur le document. On ne sait pas non plus où il fut fabriqué. On suppose qu’il s’agissait du quartier de Fives à Lille.
Logo VOIX DU NORD. 5 mars 1942. Document INTERNET. |
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En 1943, il sera tiré à
15 000 exemplaires.
M. DUMEZ sera arrêté et déporté
en septembre 1942.
Natalys DUMEZ. Résistant. Document INTERNET. |
M. NOUTOUR est arrêté en
septembre 1943. Il mourra en déportation en 1945.
Jules NOUTOUR. Résistant. Document INTERNET. |
Le 5 septembre 1944, il paraît au
grand jour sous le numéro 66 dont le rédacteur en chef est Jules HOUCKE.
Jules HOUCKE. Résistant. Document INTERNET. |
Plusieurs Pérenchinois vont
s’illustrer dans le réseau VOIX DU NORD. Vous pouvez lire leurs actions dans
les nombreux ouvrages réalisés sur ce thème ou dans les musées qui évoquent ce
sujet comme au Musée de la résistance du Fort de BONDUES.
N’hésitez pas non plus à relire
le dossier en trois parties réalisé en mai 2020 sur le thème de l’histoire de
la guerre 1939/1945 à Pérenchies que vous pouvez découvrir sur notre Blog.
Le Bleuet de France. |
Philippe JOURDAN
Président de SPMC.
Avril 2021.
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JOURDAN Si Pérenchies
m’était contée… 67, rue Jean
MOULIN 59840
PERENCHIES |
Correction
et édition : Jean-Pierre COMPERE, administrateur du Blog