Document :
Pérenchies et son passé numéro 47
Commentaire :
« Nous sommes dans les
années 30 dans la cour de récréation de l’école Jules Ferry, rue de la mairie.
Aujourd’hui, il s’agit de la rue
Henri BOUCHERY.
Par les archives municipales, on
sait que le 14 juillet 1836, le Maire François FAUQUEMBERGUE a posé la première
pierre d’une maison d’école. Est-ce qu’il en existait une auparavant ? On
n’en a pas de trace.
Il est fort probable qu’elle se
situait près de la mairie qui se trouvait alors rue de Lille (future rue du
Général Leclerc) près de l’ancien cimetière (actuel square).
Elle n’avait qu’une salle de
classe. Les garçons et les filles étaient séparés par une cloison et
l’enseignant, monté sur une estrade en hauteur, avait une vue sur les deux
parties.
En 1843, l’école est agrandie et
elle compte deux classes, l’une pour les garçons et l’autre pour les filles.
Rappelons qu’à cette époque, la ville compte moins de 900 habitants. Elle ne
donne pas l’impression d’être importante pour la Municipalité puisque, le 7 mai
1845, le préfet fait remarquer au maire que le mobilier de l’école est dans un
très mauvais état.
En 1857, la classe des filles
est transférée, rue de la Prévôté, près de la Grand’Place, dans une maison
louée à la commune par Messieurs AGACHE et M. DROULERS.
En 1878, une école de garçons et
une nouvelle mairie sont construites rue de Verlinghem qui deviendra la rue de
la mairie puis la rue Henri Bouchery.
En 1897, Le Maire, M.
DECOTTIGNIES signale que le développement considérable de la commune nécessite
un agrandissement urgent de l’école des garçons qui est constituée de 3 classes
pour 253 garçons de 6 à 13 ans. La cour est insuffisante et les récréations
sont scindées.
Il est décidé d’acheter le
terrain voisin qui appartient à Mme Veuve CLAISE et ainsi, de construire 2
nouvelles classes, un logement pour les adjoints et un préau couvert.
Vers 1900, on découvre aussi,
par les registres de présences, que les absences sont assez nombreuses.
On a relevé les motifs invoqués
par les parents : maladie, pas d’habit, pas de chaussures, école
buissonnière, blessure, indisponible car l’enfant a soigné sa mère malade,
indisposition, a pris soin de son frère, soigne le petit, travaille chez lui, …
En 1910, un établissement privé
pour les garçons est mis en construction, rue Gambetta et financé par la
famille Agache. L’école ne fonctionnera qu’une année, en 1913, à cause de la
guerre.
En 1912, l’école publique Jules
Ferry est de nouveau agrandie.
Vers 1929, de l’huile de foie de
morue est distribuée dans les écoles durant les 6 mois d’hiver. Celle-ci est
offerte par les Ets Agache. Le personnel enseignant demande à M. Agache que
cette distribution soit accompagnée d’une indemnité relative à cette distribution journalière,
celle-ci étant un travail supplémentaire mais aussi la cause de nombreux
désagréments (vêtements et chaussures tâchés). La ville décide alors de la
prendre à charge en votant une allocation de 50 francs par an et par maître
payable en 2 fois.
En 1934, on sait que des séances
de cinéma scolaire fonctionnent dans une des salles de classe.
Le 27 juillet 1937, le Maire,
Julien NUYTS et le conseil municipal décident de donner le nom de Jules FERRY à
l’école publique des garçons.
En 1943, on sait qu’une neuvième
classe est créée. Les effectifs sont de 29 à 38 élèves par classe.
Jules FERRY (1832-1893) était un
homme politique français qui a fait voter en 1881/1882 les lois scolaires
rendant l’école gratuite, laïque et obligatoire. Par gratuite, on entend le
fait que les enseignants ne sont pas payés par les parents.
Il mènera aussi une politique
coloniale active qui fera que la France s’emparera de la Tunisie, de
Madagascar, d’une partie de l’Afrique équatoriale et du Tonkin en Indochine.
Dans notre plaquette sur
l’histoire des écoles, plusieurs personnes ont raconté leurs souvenirs de
l’école Jules Ferry. En voici quelques-uns.
SOUVENIRS D’ECOLE DE 1940 de Jean Grossey (2005)
« Il m’arrive encore, parfois, de regarder une
photographie de mon enfance, une photo un peu passée : la classe de 6ème
* de l’école Jules Ferry… Il y a plus de cinquante ans.
Trente-cinq élèves réunis autour d’un instituteur qui
ne doit plus être de ce monde.
Mais les instituteurs d’alors, ne se laissaient pas
marcher sur les pieds, et certains avaient même la réputation d’avoir la main
leste ou lourde.
Curieux d’ailleurs, qu’à l’époque beaucoup
d’enseignants portaient l’uniforme… derrière les barbelés des camps de
prisonniers alors que l’armée, la Wehrmacht, s’était annexée notre préau, nous
obligeant à faire la gymnastique dans la cour par tous les temps.
Entre le buste de Socrate et la photo du Maréchal
Pétain, on en était réduit à faire cours dans des classes en surnombre, juchés
sur des bancs deux fois trop hauts pour des gamins de 9-10 ans. Malheur à celui
qui laissait tomber involontairement son plumier. Les « colles »
pleuvaient drues le jeudi matin. Inhumain certes, mais on n’en est pas mort.
A 35 en classe de 6ème, à supposer que
l’effectif ait été au complet le jour de la photo et avec de trop rares
enseignants, entre deux alertes aériennes qui nous précipitaient sous les
bancs, beaucoup ont quand même réussi à suivre une scolarité
« normale ».
Et qu’on ne vienne pas nous prétendre que tous étaient
des fils de « nantis », même si alors un gosse sur dix seulement
quittait la « communale », pour entrer au lycée ».
*La classe de sixième n’évoque pas une classe d’un
collège.
Lire, écrire et
compter…par Paul Lambin (1996)
« Curieusement, je n’ai pas conservé des années
passées à l’école des souvenirs mémorables. Après quelques temps à l’école
privée de la rue Gambetta, qu’on appelait l’école des Sœurs, je suis entré à 6
ans à la grande école, c’était en 1927. Les classes étaient numérotées je
crois, de la 10ème à la première. Je ne me souviens que des professeurs
des grandes classes : M. Blondeau, M. Carlier, M. Lejeune et surtout M.
Delaby qui était à l’époque le directeur et de ce fait officiait en 1ère,
la classe du certificat. J’avais, et je crois que nous avions tous, le plus
profond respect pour ces professeurs qui avaient une grande autorité sur leurs
élèves, mais je dois dire, que les parents de ce temps-là, soutenaient sans
réserve les maîtres. Bien souvent, les cent lignes que ma conduite m’avait
values étaient doublées par mon père. J’y regardais à deux fois avant de
recommencer. Je n’étais pas un très bon élève, sauf peut-être, en composition
française où j’obtenais souvent la meilleure note. Nous nous servions d’un
matériel plutôt rudimentaire : quelques cahiers, une géographie, seul livre
avec quelques illustrations en couleur, un livre de calcul, un livre de
grammaire et un autre de lecture et une leçon de choses. Tenant bien à l’aise
dans un plumier en bois : un porte-plume, un compas, une règle, une gomme.
Nous avions aussi une ardoise avec son porte-craie. Avec cela, pratiquement
tout le monde avait son certificat d’étude, en tous cas, tous savaient lire,
écrire et compter. Souvent au printemps, alignés dans la cour, nous nous
passions la cuillère de fer blanc qui contenait l’huile de foie de morue que
nous devions boire obligatoirement. Ensuite, pour faire passer ce délicieux
breuvage, nous avions droit à un bonbon à la menthe.
Le samedi après-midi, pour les grandes classes, il y
avait une séance de cinéma dans la salle qui est maintenant la mairie annexe.
C’était un documentaire suivi d’un grand film : les aventures du chien
Rintintin, Tom Mix, Buffalo Bill ou Michel Strogoff, … Inutile de dire que
c’était, pour nos yeux d’enfants, une grande fête.
Tout au long des classes, il y avait un grand jardin
qui était le domaine privilégié du beau-père de M. Delaby, M. Carre. Nous
bénéficions quelquefois d’un cours d’histoire naturelle improvisé quand il
apportait dans les classes des fruits ou des légumes pour nous expliquer la
nature.
« Quelquefois, les filles de l’école laïque
venaient aussi au cinéma. Pour nous, les garçons, c’était toute une
affaire ! »
Souvenirs
d’école de 1933 à 1943…Témoignage de Jules VERWAERDE (1996)
« Je suis entré à l’externat Sainte Marie à l’âge
de 4 ans. J’étais dans la classe de Sœur Denise. Tous les élèves de maternelle
se trouvaient dans la même classe. J’y suis resté jusqu’en 1935. Quand on était
sage, on avait la croix avec un ruban de couleur. J’ai un jour eu la croix avec
un ruban bleu.
En 1935, je suis rentré à l’école des garçons, rue
Henri Bouchery. Je suis resté avec Monsieur Blavoet pendant
4 ans parce que qu’il a changé
plusieurs fois de classe. Il y avait six
classes dans l’école. Tous les 15 jours, on avait une séance de cinéma, c’était
à tour de rôle, pour toutes les classes. Tous les jours, j’étais chargé d’aller
chercher les biscuits vitaminés et les petites pilules roses à l’ancienne
mairie. C’était distribué à tous les enfants des écoles pendant la guerre. Il
en restait des morceaux, je les récupérais et je les distribuais à mes copains
en échange de quelques conseils pour mes devoirs.
Après Monsieur Blavoet, je suis allé en classe avec
Monsieur Roger Herreng. Dans sa classe, je ne voulais rien faire parce que je
n’aimais pas l’école. Je fabriquais des frondes avec des élastiques et je
lançais les plumes avec. Comme punition, le maître m’envoyait chez Monsieur
Delaby, le directeur. J’y allais avec un grand sourire car il m’envoyait dans
son jardin pour cueillir des fruits ou soigner les légumes. Le jardin se
trouvait derrière l’école. C’était lorsqu’on était dans la classe de Monsieur
Delaby qu’on passait le certificat d’études.
Tous les dimanches après-midi, après les vêpres, nous
allions au patronage ».
Souvenirs d’école. Alphonse David (Texte rédigé en
1996)
« En 1925, âgé de 4 ans, j’ai pris le chemin de
l’école maternelle de la rue de la Prévôté qui
était composée de deux classes. Nous étions habillés de petits tabliers
noirs. L’école était dirigée par Madame Ghésens secondée
par une autre
enseignante et deux
dames de service.
Avec beaucoup de
patience, elles nous
ont appris les
premières lettres de
l’alphabet et à lire, écrire et compter.
La lecture de l’alphabet
se faisait au tableau et à voix
haute avec beaucoup
de répétitions et
les premières lettres,
nous les avons écrites
à la craie
sur des ardoises
en carton ou
sur des ardoises encadrées de bois.
On nous a
appris à compter
avec des bûchettes,
des petits bâtons
de bois coupés par nos parents que nous emportions
dans des petits sacs de toile. A la sortie
de l’école maternelle, nous
savions presque tous lire, écrire
et compter.
Après les deux
mois de vacances, (août et septembre), nous entrions à l’école Jules
Ferry qui n’était pas mixte. Elle se composait de 6 classes, de la 6ème
à la 1ère, celle de la
préparation au Certificat d’Etudes Primaires. L’école
fonctionnait du lundi au samedi de 8H30 à 11H30 et de 13H30 à 16H30. Le jeudi
était jour de congé. Ceux qui le désiraient, en payant, pouvaient avoir une
heure d’études surveillées le soir pour faire les devoirs et apprendre les
leçons.
Pendant la récréation, les billes et les ballons
étaient interdits. Les jeux à courir, mais sans vitesse excessive, étaient
autorisés. Une année, un panneau de basket fut placé. La fin de la récréation
était signalée par la cloche de l’école. On devait se mettre en rangs en
silence.
Chaque année, ceux, qui étaient capables, montaient
d’une classe pour arriver vers 12,13 ans au C. E. P.
Chaque matin, une morale était inscrite au tableau.
Notre directeur possédait un jardin potager et, une fois par semaine, il nous
donnait des explications sur les plantations.
Une heure par semaine, monsieur Maes, musicien de
l’Harmonie Agache, nous faisait chanter. On avait aussi une heure d’éducation
physique. Souvent, on nous alignait et nous faisait faire des mouvements avec
les bras et les jambes.
J’ai connu deux directeurs : M. Devaux et M.
Delaby. Ils étaient très exigeants sur la discipline et les devoirs.
A la fin de l’année, le Maire et le Conseil Municipal
présidaient la distribution des prix.
En dehors des vacances d’été, nous avions 5 jours à Noël
et 15 jours à Pâques.
Pour le certificat, ceux qui l’avaient pouvaient
s’acheter des cocardes tricolores et se promener avec dans les rues. Quelques-uns
continuaient leurs études. Les autres entraient dans le monde du travail.
Le 9 octobre 1934, en culottes courtes, j’entrai à la
fabrique Agache. Nous étions fiers de partir au travail et d’apporter, à nos
parents, une modeste paie ».
Philippe JOURDAN (27 avril 2020)
En cette
période de confinement que notre pays n’a jamais connue depuis des décennies en
dehors des guerres, nous avons pensé que notre association pouvait vous
présenter chaque jour un document extrait de notre fond documentaire composé de
plus de 8 000 photos.
Quand
l’occasion se présentera, un petit commentaire suivra la photographie. La page
sera publiée chaque jour à partir de 10H.
N’hésitez
pas à nous transmettre vos propres commentaires ou informations sur le sujet
présenté. Cela permettra de compléter nos connaissances sur Pérenchies et son
passé.
Philippe
JOURDAN, Président de « Si Pérenchies m’était contée … ». 20
mars 2020
Correction
et édition : Jean-Pierre COMPERE, administrateur
du Blog